jeudi 25 juillet 2013

Soins psychiatriques : deux députés veulent alléger la "sécurisation"

LE MONDE | 
Noyée parmi les 33 projets de loi débattus en session extraordinaire, la proposition de loi sur les soins sans consentement en psychiatrie a été accueillie sans bruit. Il s'agit pourtant de revenir sur l'une des réformes les plus contestées des dix dernières années en matière de santé mentale.
Déposée le 3 juillet par les députés socialistes Denys Robiliard et Bruno Le Roux, la proposition de loi modifie les dispositions législatives du 5 juillet 2011, qui avaient été en partie censurées par le Conseil constitutionnel le 20 avril 2012, en raison de l'insuffisance des garanties légales encadrant l'admission des patients en unité pour malades difficiles (UMD) et les hospitalisations d'office des personnes reconnues pénalement irresponsables.
En novembre 2008, après la mort à Grenoble d'un étudiant poignardé par un malade en fuite, Nicolas Sarkozy avait annoncé vouloir "sécuriser"davantage les hôpitaux psychiatriques. Le fait divers à l'origine de la loi de 2011 avait poussé au renforcement des mesures de rétention à l'égard des malades, en verrouillant davantage les hospitalisations d'office. En plus des restrictions des conditions de sortie des patients internés sans consentement, la loi avait permis l'application des soins sous contrainte à domicile.
Le législateur avait dû intégrer les réserves du Conseil constitutionnel qui, déjà, s'était prononcé sur l'illégalité des conditions d'hospitalisation d'office, une décision qui avait abouti à l'intervention obligatoire d'un juge des libertés et de la détention.

"TOUS CRAIGNENT LA RÉCIDIVE"

La proposition déposée par Denys Robiliard, le député du Loir-et-Cher, se présente comme "la fille de la décision du Conseil constitutionnel". Principale mesure, la modification du statut des UMD, revenues dans le droit commun de la psychiatrie : le passage par ces centres sera d'abord justifié par la pathologie du malade et non sur le seul critère de dangerosité. Les sorties de courte durée, supprimées par la loi de 2011, sont réintroduites, et le juge se déplacera désormais à l'hôpital pour les audiences : les malades devaient jusqu'ici être amenés au palais de justice menottés.
Ces mesures ont été accueillies avec soulagement dans le milieu psychiatrique, mais sont jugées insuffisantes. Si le texte remet en question les modalités de levée des soins contraints, il ne met que partiellement en cause le régime dérogatoire qui touche les malades hospitalisés d'office reconnus pénalement irresponsables. "Tous craignent la récidive ! Pourtant, aucune étude ne prouve que les irresponsables pénaux sont plus dangereux que les autres patients qui font l'objet d'une hospitalisation d'office", s'agace Jean-Claude Pénochet, président du Syndicat des psychiatres des hôpitaux.
De son côté, l'Union nationale des familles de malade (Unafam) s'inquiète"du non-encadrement des entrées en UMD", qui ne font aujourd'hui l'objet que d'une expertise médicale "quand la sortie en nécessite cinq". Sans illusions, tous attendent les approfondissements apportés par la grande loi sur la santé mentale, promise en mars par Marisol Touraine, la ministre de la santé. Mais pour André Bitton, président du Cercle de réflexion et de propositions d'actions sur la psychiatrie (CRPA), les patients ont déjà gagné le premier set, "en portant aux yeux de tous la condition de ces malades longtemps résignés au silence".

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