mercredi 17 octobre 2012

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Remous au sein des Hôpitaux de Paris

L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), en pleine restructuration, connaît un regain de tensions depuis la rentrée. La ministre de la Santé a reçu sa directrice générale Mireille Faugère et son président de CME, pour faire le point sur l’actualité du premier CHU français (38 hôpitaux et 7 milliards d’euros de dépenses annuelles). Gros plan sur trois dossiers chauds.
• Restructuration de l’Hôtel-Dieu : un projet emblématique et clivant
Avant-hier, manifestation et banderoles devant l’Hôtel-Dieu, sur l’île de la Cité. Élus de gauche et blouses blanches clament leur colère en présence des badauds et de la presse. « Il faut une victoire à Paris sur le plus vieil hôpital, lance Christian Gabet, de la CGT. Ça permettra aux collègues à Trousseau, à Fernand Vidal et ailleurs, d’avoir de l’espoir ». Le projet de réorganisation porté par la direction de l’AP-HP ne convainc pas les troupes présentes. Un militant d’Act Up prend le micro. « Si je suis encore séronégatif, c’est grâce aux urgences de l’Hôtel-Dieu qui m’ont administré un traitement post-exposition après une rupture de préservatif, expose-t-il. Les séropositifs ont déjà déménagé plusieurs fois, d’abord à Pompidou, puis à l’Hôtel-Dieu. Le Marais n’est pas loin. Pour faire des musées, des logements de fonction et des bureaux, on va une nouvelle fois déménager des personnes qui ont besoin de stabilité ».
Les interventions se succèdent, qui dénoncent « la casse de l’hôpital public »« L’hôtel Miramion est acheté par le PDG de Free : voilà ce qu’on fait de nos structures », lance Rose-May Rousseau, secrétaire générale de l’USAP-CGT. Les urgences de l’Hôtel-Dieu vont-elles fermer ? Aux yeux du Dr Gérald Kierzek, ce serait une lourde erreur : « Tous les services d’urgences sont saturés à l’AP-HP. On n’écoute pas les gens sur le terrain ». Un militant de la CGT appelle à la démission de Mireille Faugère, DG de l’AP-HP, et de Claude Évin, directeur de l’ARS d’Ile-de-France : « On ne voit pas grand-chose de gauche dans le projet régional de santé qui fait la part belle au privé. À Paris, il y a toute une frange de la population qui n’a plus les moyens de se soigner. À l’Hôtel-Dieu, il faut des urgences et des lits d’hospitalisation. On arrachera les choses ».
• Chirurgie cardiaque : l’IGAS au secours de Henri Mondor
Hier, autres banderoles, autres revendications, à l’hôpital Henri Mondor cette fois. Les syndicats de personnel se battent pour le maintien de la chirurgie cardiaque dans cet établissement du Val-de-Marne. Le service, dans le collimateur de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France, a bénéficié l’an passé d’un sursis accordé par Xavier Bertrand -selon diverses sources, le fait qu’un parent de l’ancien ministre y ait été soigné pourrait ne pas être étranger à cette décision. L’ARS, s’étant rangée bon gré mal gré derrière l’avis ministériel, a renvoyé la balle dans le camp de l’AP-HP ; à charge pour l’établissement de désigner lequel fermer de ses quatre services de chirurgie cardiaque (HEGP, la Pitié Salpêtrière, Bichat, Henri Mondor).
L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a mené un audit approfondi de la situation. Ses conclusions, remises en août au ministère de la Santé, se gardent de cibler le site à fermer. Mais les arguments en faveur de Henri Mondor se lisent entre les lignes. Les inspecteurs listent les atouts du service : recrutement de patients en pleine augmentation, environnement hospitalier favorable avec une activité de chirurgie importante et une chirurgie vasculaire de grande renommée, bonne coopération médicale et dynamisme de l’équipe. La mortalité post-opératoire a été « divisée de moitié dans les premiers mois de 2012 », ajoute l’IGAS, qui préconise de poursuivre les recrutements médicaux afin de soutenir la relance de l’activité à Henri Mondor.
L’ARS reverra-t-elle sa copie ? La direction de l’AP-HP a-t-elle pris une décision de son côté ? Face au flou général, la coordination pour la défense de la chirurgie cardiaque à l’hôpital Henri Mondor (qui regroupe syndicats, usagers et élus de tous bords) monte au créneau et demande un débat public.
• Coup de chauffe entre la CME et la direction de la politique médicale
Y a-t-il un acteur de trop pour décider des grandes orientations stratégiques engageant la communauté médicale du premier CHU français ? C’est ce que semble penser le Pr Loïc Capron, président de la Commission médicale d’établissement (CME) de l’AP-HP. Le médecin interniste, largement élu en janvier dernier, considère que la direction de la politique médicale (DPM) « a jusqu’ici été un obstacle » à la coordination de la politique médicale de l’établissement. Dit plus abruptement, la DPM parasite les réflexions en cours, et doit disparaître.
Le président de la CME et le Pr Michel Fournier, un ancien membre de la CME pilotant la DPM de l’AP-HP depuis 2010, sont en désaccord sur plusieurs projets de réorganisation. Le premier peut se prévaloir d’une légitimité issue des urnes, quand le second, nommé par la direction générale de l’établissement, est perçu comme le bras droit de l’administration. La CME elle-même est traversée par différents courants. Pour arbitrer ce conflit sensible, l’ARS a été appelée à la rescousse. Claude Évin a confié une mission de médiation à Didier Delmotte et le Pr Alain Destée, les anciens directeur général et président de la CME du CHU de Lille. Une décision devrait être prise dans les prochaines semaines.
› DELPHINE CHARDON
Le Quotidien du Médecin  du 17/10/2012

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