mercredi 26 septembre 2012

Vif débat chez les psys sur l'homoparentalité

LE MONDE | 
Un couple de femmes de la Marne et leurs quatre enfants en 2011.
Un couple de femmes de la Marne et leurs quatre enfants en 2011. | AFP/FRANCOIS NASCIMBENI

Un enfant peut-il avoir deux pères ou deux mères et se développer normalement ? Alors que le gouvernement s'apprête à ouvrir le mariage et l'adoption aux homosexuels, les pédopsychiatres et les psychanalystes sont divisés. Premier argument des opposants : l'enfant a besoin de s'identifier à du masculin et à du féminin. Il lui faut de la différence sexuelle, de l'"asymétrie", explique Maurice Berger, chef de service en psychiatrie de l'enfant au CHU de Saint-Etienne. "Le désir qui a présidé à sa conception, les échanges qu'il a dès les premiers jours de sa vie ne sont pas les mêmes dans le cas d'un père et d'une mère", poursuit-il.


Deuxième objection, le besoin de se représenter une origine crédible."L'enfant se demande d'où il vient et a besoin d'établir un scénario qui colle, explique Christian Flavigny, directeur du département de psychanalyse de l'enfant à la Pitié-Salpêtrière à Paris. Il sait bien que deux personnes de même sexe ne peuvent pas procréer. Une loi qui viendrait légaliser une filiation impossible serait une falsification.""Quand vous ne pouvez pas penser vos origines, que vous vous dites que vous venez de quelque chose d'impossible, vous n'avez pas d'identité narcissique cohérente, renchérit Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre. Cela peut devenir extrêmement problématique."
"Evidemment, les homosexuels ne disent pas à leurs enfants qu'ils les ont engendrés, rétorque la psychanalyste Geneviève Delaisi de Parseval. Ces enfants naissent comme tout le monde d'un gamète mâle et d'un gamète femelle. Ils savent bien qu'il y a une troisième personne dans l'histoire, un donneur connu ou inconnu." Les associations de parents homosexuels demandent d'ailleurs le remplacement de la mention "né de", sur le livret de famille, par la mention "fils de".
Pour Serge Hefez, pédopsychiatre à la Pitié-Salpêtrière, les opposants"confondent la famille, qui est une donnée sociale, avec l'engendrement, qui est une donnée biologique""Toutes les sociétés fabriquent des formes de famille qui s'éloignent du biologique, poursuit-il. Deux personnes qui n'ont pas engendré un enfant peuvent être ses parents, qui l'aiment et l'élèvent. Cela ne pose pas de problème si les choses sont claires pour l'enfant."
"LES HOMOSEXUELS SONT DES PARENTS AUSSI COMPÉTENTS QUE LES AUTRES"
"Vive cette loi !, lance le pédopsychiatre Marcel Rufo. On voit déjà plein d'enfants dans ces situations. Les homosexuels sont des parents aussi compétents que les autres. Les enfants acceptent toujours leur homosexualité s'il y a de la pudeur de leur part."
Stéphane Clerget, pédopsychiatre à Paris, ne voit également "rien de préoccupant" dans le projet. "Ce qui est important pour l'enfant, c'est de savoir biologiquement d'où il vient et qui a des droits sur lui, estime-t-il. L'interdit de l'inceste doit être mis en place de la même façon que pour les couples hétérosexuels. Une fois qu'il sait tout cela, il peut évoluer harmonieusement dans différents contextes." L'identification au masculin et au féminin peut se faire avec d'autres personnes que les parents, estiment ces spécialistes.
Un aspect de la future loi est particulièrement débattu : l'accès à la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de lesbiennes. Une autorisation de la PMA ne risquerait-elle pas de multiplier le nombre d'enfants privés de la connaissance d'une partie de leur origine biologique, le don de gamètes étant anonyme en France ? Les opposants au projet de loi répondent logiquement qu'il ne faut pas l'autoriser. Les partisans qu'il faut mettre fin à l'anonymat du don.

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