mardi 28 août 2012

EXCLUSIF AFP - Réforme du système de santé: pavé dans la mare de Terra Nova

23 août 2012

Retirer des prérogatives à la Sécu au profit de l'Etat, réguler les mutuelles santé, prendre ses distances avec la référence au médecin de famille : Terra Nova lance un pavé dans la mare avec ses propositions pour "réinventer le système de santé".

La fondation, proche du PS, fait une trentaine de propositions décapantes dans un rapport qui sera distribué dès vendredi à l'université d'été du PS à La Rochelle et dont l'AFP a eu connaissance.

Intitulé "Réinventons notre système de santé au-delà de l'individualisme et des corporatismes", le texte préconise de s'éloigner du modèle d'organisation de la santé autour de la Sécurité sociale datant de 1945, jugé dépassé et fragilisé.
Pour garder un système solidaire, capable de résister aux sirènes du marché, Terra Nova prône un plus grand rôle de l'Etat, dans le domaine réservé de la Sécu, mais aussi dans l'assurance maladie complémentaire, ce qui signifie empiéter fortement sur le pré carré des syndicats (Sécu) et sur celui des mutuelles pour les complémentaires, des acteurs qui sont pourtant des soutiens traditionnels de la gauche.
La gauche "ne peut se contenter de valoriser l'héritage de la Libération" peut-on lire dans l'introduction du rapport, rédigé par le sociologue Daniel Benamouzig. "Elle doit l'adapter aux transformations de notre temps quitte à s'écarter pour cela du modèle historique de 1945 dont sont issus certaines de ses valeurs et certains de ses soutiens".
L'assurance maladie qui, comme les trois autres branches de la Sécurité sociale, était gérée en 1945 par les partenaires sociaux, a vu, au fil des décennies, ses prérogatives grignotées par l'Etat.
Terra Nova propose d'aller plus loin et de rapprocher les structures actuelles de régulation de l'assurance maladie de l'administration centrale de la santé au plan national, et au plan régional des récentes Agences régionales de santé (ARS).
Complémentaire santé obligatoire En matière de remboursements, le rapport souhaite "un haut niveau de prise en charge" et propose deux options. La première serait "une extension de la couverture par la sécurité sociale sur le modèle du régime existant en Alsace Moselle".
Ce régime particulier, adossé au régime général, rembourse mieux la plupart des soins et médicaments (hors optique et dentaire), au moyen d'une assurance complémentaire obligatoire.
La deuxième solution serait la mise en place d'une "assurance obligatoire complémentaire régulée" par l'Etat, imposée par contrat aux complémentaires santé (mutuelles, assurances, institutions de prévoyance), suggère Terra Nova qui préconise aussi la création d'une "autorité indépendante de régulation de l'assurance complémentaire santé".
S'agissant du parcours de soins, Terra Nova estime que les relations médecins-patients ont profondément changé et appelle à "en finir avec la référence au médecin de famille", rebaptisée "médecin traitant" avec la réforme de 2004.
"Cette réforme a figé une représentation conservatrice de la pratique médicale ambulatoire au lieu de la transformer" et ne "correspond plus aux pratiques ni des patients ni des professionnels de santé".
"Un certain nombre de propositions peuvent être mises en oeuvre rapidement", a déclaré M. Benamouzig à l'AFP, en citant la création réclamée d'indicateurs sur les inégalités sociales de santé.
"Il y en a d'autres, relevant plus de l'architecture du système, qui nécessitent une transition", selon le sociologue qui souhaite néanmoins que le débat soit ouvert rapidement.
Selon Didier Tabuteau, responsable de la chaire santé de Sciences Po, l'idée d'un pilotage unique de la politique de santé et d'assurance maladie remonte déjà à quelques années. "Mais je n'ai pas encore vu de signes d'annonces gouvernementales sur ce terrain", a-t-il dit à l'AFP.

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