mardi 6 décembre 2011


Un fou criminel peut-il échapper à la prison ?

Stéphane Moitoiret doit être jugé ce lundi pour le meurtre d'un petit garçon de 10 ans en juillet 2008. Mais compte tenu de sa santé mentale, il pourrait être considéré comme irresponsable pénalement.
Le procès de Stéphane Moitoiret et de sa compagne, soupçonnés d'avoir torturé puis tué un garçon de 10 ans en juillet 2008, s'ouvre ce lundi devant les assises de l'Ain. L'enjeu principal sera de savoir si le meurtrier présumé de Valentin est responsable pénalement, compte tenu de sa santé mentale.
Le 29 juillet 2008, le corps du petit garçon était découvert, lardé de 44 coups de couteau, dans une rue de Lagnieu. Très vite, un couple de marginaux est interpellé : Stéphane Moitoiret et sa compagne. Ils se présentant comme des "pèlerins australiens chargés d'une mission divine".Lors de ses auditions, Stéphane Moitoiret évoquait la possibilité d'avoir été"téléguidé par un esprit démoniaque".
Trois collèges d'experts psychiatres s'accordent pour dire que Stéphane Moitoiret souffre de "psychose", mais ils sont divisés sur la question de sa responsabilité pénale.
Quatre experts concluent à une "abolition totale" de son discernement, ce qui entraîne une irresponsabilité pénale, tandis que six autres parlent d'une simple "altération" de son discernement. Si Stéphane Moitoiret est déclaré irresponsable pénalement, il ne sera pas jugé mais placé en hôpital psychiatrique.
Qu'est-ce que l'irresponsabilité pénale ? Comment distinguer l'"abolition" de l'"altération" du discernement ?

1. Une personne atteinte d'un trouble psychique au moment des faits n'est pas responsable de ses actes

La responsabilité pénale est prévue à l'article 121-1 et suivants du code pénal. La loi explique qu'on est responsable de ses propres actes tant qu'on en a conscience.
Dans divers cas, on peut être déclaré irresponsable, ou notre responsabilité peut être atténuée : ce sont les cas des violences involontaires (un médecin qui se trompe lors d'une opération, par exemple), de force majeure (si on a commis un crime sous la contrainte), de légitime défense… ou d'altération du discernement.
C'est cette dernière notion qui nous intéresse. L'article 122-2 du code pénalprécise qu'une personne n'est pas responsable pénalement si elle "était atteinte, au moment des faits d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes".
  • Seule l'absence totale de discernement (l'"abolition de discernement") permet de déclarer l'irresponsabilité pénale d'un prévenu. Dans ce cas, celui-ci ne sera pas jugé.
  • Si le trouble psychique n'a fait qu'"altérer son discernement", la personne poursuivie "demeure punissable"Elle sera donc jugée mais, précise le code pénal, "la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine".

2. L'internement en hôpital psychiatrique n'est pas une peine mais une décision administrative

Quand le prévenu est déclaré irresponsable, cela signifie qu'il n'y a pas de procès pénal. En revanche, il pourra être poursuivi au civil (la juridiction qui accorde des dommages et intérêts aux victimes) et condamné.
Le Procureur va décider de le faire interner pour qu'il reçoive des soins. Dans ce cas, "il ne s'agit pas d'une peine mais d'une décision administrative d'internement d'office", précise Xavier Prugnard de la Chaise, avocat au Barreau de Paris.
En sortant, son casier judiciaire restera vierge.
Article initialement publié le 30 novembre.

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