dimanche 23 octobre 2011


Doubles virtuels: quand la psychiatrie s’inspire des Sims



Soigner grâce au virtuel, une chimère ? Plus tellement. Au Pôle Aquitain de l’Adolescent de Bordeaux, un pédopsychiatre a en effet élaboré une thérapie très efficace à destination d’adolescents souffrant de troubles comportementaux et alimentaires : la création de doubles numériques.
Le Dr Pommereau déplorait l’efficacité limitée des entretiens psychologiques traditionnels, souvent ressentis comme longs et inconfortables par les jeunes patients, la plupart du temps incapables de verbaliser leur mal-être. « Que peuvent-ils dire de plus que Ma vie est pourrie, y’en a marre? » affirme le médecin. « Cette génération a tout à montrer mais rien à dire tant qu’il n’y a pas d’image pour support ». Le Dr Pommereaucommence par tâtonner, propose aux adolescents de se dessiner, de se sculpter, de se peindre. Puis, inspiré par une de ses patientes adepte des Sims, l’idée d’une autre technique d’auto-représentation commence à germer dans son esprit: celle de l’avatar numérique.
Lors des sessions de soin, on demande en fait aux patients de se construire un avatarsur un ordinateur: ils choisissent la forme de leur visage, de leur nez et leurs sourcils, ainsi que la couleur de leurs cheveux, de leurs yeux et de leur peau. Ils peuvent même ajouter des tâches de rousseur, du maquillage, voire des tatouages et des piercings. Ce double virtuel sert de miroir, moins cruel que celui du monde réel, car les patients y construisent leur reflet et se modèlent à leur guise. Un rapport au corps différent finit par s’installer, la parole se libère. « L’effet de distance leur permet d’observer ce qu’ils donnent à voir d’eux-mêmes », affirme le Dr Pommereau.
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Une méthode comparable aux techniques projectives utilisées en marketing, dans le but de dépasser les blocages liés à la verbalisation directe de certains concepts (affects, valeurs, mort, sexe, famille…) lors d’entretiens avec des consommateurs. Concrètement, l’enquêteur demande aux participants de s’exprimer par l’intermédiaire d’un support de projection, ce qui les force à contourner un certain nombre d’écrans psychologiques, et à révéler des pensées latentes, cachées: une matière d’étude plus riche pour l’enquêteur. Plus riche également, donc, pour le psychiatre. Emilie, une patiente, l’a très bien compris :« En entretien, on sent bien qu’on est étudié, alors on reste évasif. On n’ose plus bouger ! Là c’est ludique, on sent moins le regard du psy ».
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