mercredi 15 décembre 2010

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Le psychiatre Daniel Zagury dénonce “la stigmatisation démagogique” de la récidive
Article de Patricia Jolly,
paru le 10/12/10 sur lemonde.fr

Le procès de Thierry Devé-Oglou - accusé du meurtre d’Anne-Lorraine Schmitt en 2007 et déjà condamné pour un viol remontant à 1995 - relance le débat sur la récidive des délinquants sexuels, et sur la fiabilité des expertises psychiatriques déterminant leur “dangerosité”.

Daniel Zagury, expert psychiatre près la cour d’appel de Paris, souligne que cette dangerosité est “une notion prospective, statistique, probabiliste dont la certitude est exclue , et que si le psychiatre a sa place dans l’évaluation de la dangerosité, il n’en a pas l’exclusivité”.

“Il ne s’agit plus pour le psychiatre de diagnostiquer et traiter une maladie, rappelle-t-il, mais de pronostiquer que le sujet est porteur - ou non - de facteurs de risque.” Et cette opération n’est pas aisée. “Car le coupable de la récidive devient l’expert psychiatre, ou d’autres acteurs de la chaîne pénale auxquels on reproche d’avoir fait une mauvaise évaluation”, déplore le docteur Zagury.

“Cette stigmatisation démagogique est contre-productive, estime-t-il, car elle terrorise les acteurs de la chaîne pénale tout en offrant aux pervers une incitation à la récidive, puisqu’ils n’en sont plus tenus pour responsables.”

Le risque zéro est une quête “illusoire car inhumaine”, selon le docteur Zagury, qui dénonce “l’utilisation de ces drames humains à des fins politiques et électoralistes”.

Diminuer encore ce phénomène de récidive lui semble cependant possible. “La balle est dans le camp des politiques, assure-t-il. Ils doivent contribuer à mettre en place une chaîne d’interventions rationnelles, et adopter - comme c’est le cas au Québec - le même discours que tous les autres acteurs de cette chaîne sur l’efficacité de la libération conditionnelle et de l’encadrement par rapport à la récidive.”

Il s’agit notamment, selon le docteur Zagury, de se dégager de l’obsession des soins et des traitements, pour favoriser “un contrôle bienveillant mais ferme, à base d’accompagnement thérapeutique et de balisage du parcours”.

“La rencontre avec l’agent de probation et d’insertion ou le travailleur social est tout aussi utile que le soutien thérapeutique, conclut le docteur Zagury. Car ce qui pousse le délinquant sexuel à la récidive le plus souvent n’est pas une pulsion, mais un sentiment d’isolement et d’abandon.”



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