samedi 28 novembre 2009





«On isole quand on ne sait pas comment s’y prendre»

ALAIN MERCUEL Psychiatre Sainte-Anne à Paris :


«La montée de l’enfermement ? Il n’y a aucune donnée, juste des hypothèses.

Comment l’expliquer ? D’abord, c’est le manque de personnel qui est en cause, avec le recours à des intérimaires qui ne connaissent pas les patients. On isole plus facilement quand on ne sait pas comment s’y prendre. «En second lieu, il y a l’afflux de patients plus difficiles. Ils sont plus lourds, ils échappent aux traitements car ils en ont pris souvent beaucoup. Et à cela s’ajoutent des toxiques, voire des drogues qu’ils ont pris de plus en plus. Il y a, également, les cas de SDF qui ont accumulé des exclusions familiales. Or bien souvent, quand il n’y a pas l’aide de la famille, la situation empire.

«Enfin, il y a ce que j’appellerai la mondialisation des psychotiques, que l’on voit dans les rues des grandes capitales. Ce sont des malades étrangers qui ont des parcours invraisemblables, terriblement douloureux, et qui arrivent perdus dans nos villes. Toutes ces nouvelles populations rendent nos pratiques de plus en plus difficiles. Et provoquent un recours plus régulier à la contention et aux chambres d’isolement.

«Pour le reste, que dire ? Isoler, cela peut permettre de passer la phase aiguë. Mais, si on justifie ces pratiques comme une technique médicale, il faut alors des indications médicales strictes. Il doit y avoir des protocoles et du personnel. La contention et l’isolement sans personnel, c’est une catastrophe. Une contention sans parole, c’est même à mon sens une faute professionnelle.»


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