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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

jeudi 22 décembre 2011


Incitation financière pour la psychiatrie judiciaire?

Par Europe1.fr
Des internes en psychiatrie pourront être incités financièrement afin de pallier la pénurie d'experts psychiatres que connaît la justice, et devront suivre un cursus en sciences criminelles ou en psychologie, selon une mesure votée mercredi en commission à l'Assemblée.
Cette disposition s'inscrit dans le projet de loi sur l'exécution des peines qui a été adopté mercredi en commission des Lois, selon une source parlementaire, et qui doit être examiné en séance publique à partir du 10 janvier.

Le temps passe plus ou moins vite selon l'âge

Enfants, personnes âgées, mélancoliques, schizophrènes, autistes… chacun perçoit le temps à sa façon.

C'est un objet d'étude assez insaisis­sable - la perception du temps - qui a réuni pendant tout un colloque psychiatres, psychologues, philosophes et experts en biologie moléculaire, le 16 décembre dernier à l'université de Rennes

Enfants, seniors, dépressifs, schizophrènes, autistes: chacun a sa perception du temps qui passe. C'est grâce à une horloge interne et à un mécanisme de comptage évolué que notre cerveau semble capable d'estimer la durée d'un moment passé et, parfois, de se tromper.

Une chose est sûre: le temps ne passe pas à la même vitesse pour tout le monde.Les rythmes biologiques pourraient peut-être expliquer certaines variations de la perception du temps en fonction de l'âge: «Les personnes âgées ayant une fréquence cardiaque ralentie auront l'impression que ce qui les entoure va très vite, alors que les enfants (qui ont une fréquence cardiaque accélérée) ont l'impression que tout va trop lentement », détaille le Pr Sylvie Tordjman, responsable du pôle hospitalo-universitaire de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent de Rennes.

Le Dr Dina Joubrel, psychiatre et coordonnatrice de la cellule d'urgences médico-psychologique de la région Bretagne, insiste sur la subjectivité de la perception du temps selon les situations: «En cas de traumatisme, le temps est comme figé. Il reste tel quel, il devient intemporel, il n'évolue plus. Le temps du mélancolique, lui, est éternel, il ne finira jamais, et il y a un risque de passage à l'acte (le suicide, NDLR) pour l'arrêter. Au contraire, le temps de l'angoisse se resserre, devient trop court, c'est un temps de l'immédiateté.»

Effet accélérateur des émotions

Ainsi, dans la schizophrénie, une maladie marquée par des pensées délirantes, la perception du temps se trouve-t-elle aussi modifiée. «Ce qui est étrange, soulève le Dr Olivier Bonnot, pédopsychiatre (Pitié-Salpêtrière, Paris), c'est que le temps devient ramassé - comme si tous les événements s'étaient agglomérés - seulement lorsque les premiers symptômes de la maladie se manifestent, souvent entre 15 et 25 ans. Nos recherches plaident plutôt pour un mécanisme dû aux problèmes cognitifs (mémoire, attention). »

Les émotions pourraient aussi accélérer le débit du générateur d'impulsion de notre horloge interne, d'où une sensation que le temps passe plus vite. L'attention peut également avoir un effet modulateur: «L'attention portée à un événement est corrélée à la perception subjective de sa durée», explique le Pr Tordjman.Il est plus difficile de comprendre pourquoi le temps semble aller au ralenti lorsque l'on attend quelque chose.

Dans une étude sur 50 enfants autistes, Sylvie Tordjman a ainsi pu mettre en évidence chez près des deux tiers d'entre eux la disparition des fluctuations normales du cortisol, hormone de l'éveil qui monte en principe progressivement avec un pic de sécrétion vers 8 heures: «Ne pas être confronté à des fluctuations biologiques majeures pourrait entraîner des difficultés à s'adapter au changement et jouer un rôle dans l'intolérance au changement observée chez les enfants autistes. Les enfants avec autisme auraient besoin de créer des discontinuités stéréotypées comportementales et/ou idéiques (par exemple, balancement du corps), car des discontinuités répétées à intervalles réguliers leur auraient manqué dans leur développement physiologique, du fait, par exemple, du trouble des rythmes biologiques.»

Recréer une harmonie

On peut avec saint Augustin relever que le temps passé n'existe plus et que le temps futur n'existe pas encore, nous condamnant au présent, mais la perception du temps est plus délicate encore puisqu'il faut un intervalle entre deux événements pour estimer à quelle vitesse il est passé. «Imaginons que je sois au pub avec des amis. À un moment, je regarde l'heure et je suis surpris de voir qu'il est 3 heures du matin. Je me dis que le temps est passé vite. Du moins, je fais cette déduction, car je ne m'en suis pas rendu compte sur le coup », explique le Pr John Wearden (université de Keele, Angle­terre), un psychologue dont les travaux ont transformé la notion de perception du temps chez l'homme à la fin des années 1980. Pour éclairer la perception humaine du temps, Wearden a modifié un modèle de mesure des performances en temps limité (Scalar Expectancy Theory [SET]) proposé chez l'animal: « Tout se passe comme si nous avions dans le cerveau un générateur d'impulsions. Ces impulsions sont stockées dans un accumulateur, et c'est là que se trouve la représentation brute du temps. Lorsqu'il est peu rempli, on dit que le temps est passé lentement », précise-t-il.
Recréer une harmonie entre le temps biologique, le temps mesuré, le temps vécu serait donc un gage de bonne santé ou de bien-être. « Notre organisme comporte de nombreuses horloges biologiques, remarque le Pr Yvan Touitou, vice-président de la Société internationale de chronobiologie. Je ne sais pas où est le chef d'orchestre, mais je ne peux pas imaginer qu'elles ne soient pas coordonnées entre elles.»

Les infirmières scolaires ne veulent pas d'un "A bricolé"

Si les infir­mières sco­laires ont obtenu leur inté­gra­tion en caté­go­rie A, elles refusent les grilles indi­ciaires, qui les situent en deçà de leurs col­lègues hos­pi­ta­lières. Indignation, décou­ra­ge­ment… Alors que leurs mis­sions les placent au cœur du dis­po­si­tif de réus­site sco­laire, les infir­mières en colère espèrent une issue heu­reuse aux négo­cia­tions avant la fin de l'année.

« Quand les élèves viennent me voir, les pro­blèmes sont tel­le­ment durs, que chez moi, ça passe par les tripes. Quand je devine quelque chose que je veux faire sor­tir d'eux, c'est un corps à corps qui peut prendre du temps » (1) : mettre en mots les maux des élèves est une des nom­breuses mis­sions que relèvent au quo­ti­dien les 7.500 infir­mières sco­laires, dont le sta­tut fait actuel­le­ment l'objet d'âpres négo­cia­tions. « La trans­po­si­tion de notre sta­tut en caté­go­rie A a été une pro­messe du pré­sident de la République, un sym­bole fort. Si nous venons de l'obtenir, le scé­na­rio nous impose une grille de rému­né­ra­tion indi­ciaire en deçà de celle appli­quée à nos col­lègues hos­pi­ta­lières ! C'est insup­por­table, c'est un déni de nos qua­li­fi­ca­tions et de notre pro­fes­sion­na­lisme. Les infir­mières ont toutes le même diplôme », s'insurge Béatrice Gaultier, secré­taire géné­rale du SNICS-FSU (2). Se sen­tant « déva­lo­ri­sées», « mépri­sées »... les infir­mières sco­laires expriment leur ras-le-bol d'une voix commune.

Des res­pon­sa­bi­li­tés grandissantes

« Dans nos infir­me­ries, on ne tri­cote pas ! ». Patricia François est infir­mière sco­laire à Caen dans un col­lège classé en ZEP depuis 1988. « Le minis­tère ne pourra faire l'économie de se pen­cher sur nos mis­sions qui ont tant évolué ». Face à une conjonc­ture tou­jours plus dif­fi­cile, les infir­mières voient gran­dir la souf­france des élèves : « le soin n'est plus la prio­rité car lorsqu'il n'y a plus rien dans l'assiette on ne va pas chez le den­tiste », souligne-t-elle. « Je ne pen­sais pas qu'il puisse exis­ter autant de mal-être, de dif­fi­cul­tés per­son­nelles au sein de cette géné­ra­tion » abonde Jean Lamoine, un des rares hommes de sa pro­fes­sion, qui exerce dans un inter­nat. Ecoute indi­vi­duelle, actions col­lec­tives, les infir­mières sco­laires ont un rôle spé­ci­fique : « il faut faire sa place dans l'équipe péda­go­gique et convaincre les ensei­gnants car nous por­tons un regard dif­fé­rent sur les élèves », témoigne Catherine Sanz, infir­mière au col­lège Gérard Philippe à Fontaines. L'infirmier sco­laire doit faire preuve d'une grande auto­no­mie et assu­mer des res­pon­sa­bi­li­tés de plus en plus impor­tantes. « Avec pour seule hié­rar­chie le chef d'établissement, nous enga­geons tota­le­ment notre res­pon­sa­bi­lité indi­vi­duelle, tant au plan civil que pénal, pour prendre les ini­tia­tives : poser un diag­nos­tic infir­mier, mettre en œuvre les actions adap­tées », témoigne Jean Lamoine, qui rap­pelle com­bien la santé est « un fac­teur déter­mi­nant dans la réus­site sco­laire ».
Outre la mise en place des séances obli­ga­toires d'éducation sexuelle et la déli­vrance d'ordonnances pour la pilule du len­de­main, les infir­mières sco­laires peuvent désor­mais renou­ve­ler la pilule contra­cep­tive. «Si ces actions per­mettent d'éviter des IVG dra­ma­tiques, il reste un tra­vail de pré­ven­tion impor­tant à pour­suivre : en effet, les élèves ont accès à plus d'informations, mais dans les familles, on parle de moins en moins », sou­ligne Patricia François. « La rela­tion est pri­vi­lé­giée car l'infirmier ne note pas, ne juge pas et les élèves savent que c'est un lieu de confi­dence où le secret est pré­servé. Nous sommes le 1ermaillon, 1er inter­lo­cu­teur des élèves, c'est pour­quoi ne pas être consi­déré par notre minis­tère est inac­cep­table » clame Jean Lamoine. « Nous ne vou­lons pas d'un A bri­colé », ajoute Catherine Sanz.

Le minis­tère attendu au tournant

Si la reva­lo­ri­sa­tion a été effec­tive depuis sep­tembre 2010 au sein de la Fonction publique hos­pi­ta­lière (FPH) ce n'est que suite à leur mani­fes­ta­tion (3) que les infir­mières sco­laires ont obtenu le 15 novembre leur inté­gra­tion à la Fonction publique d'Etat en caté­go­rie A, et les négo­cia­tions se pour­suivent. « La reva­lo­ri­sa­tion est pré­vue sur 10 ans au lieu des 5 pour la FPH, et la grille indi­ciaire induit des écarts impor­tants dans les évolu­tions, qui créent des car­rières à 2 vitesses », explique Brigitte Accart, secré­taire géné­rale du SNIES-UNSA (4). La caté­go­rie A pro­po­sée par le minis­tère pour le moment com­porte en effet 2 grades, mais le 2e grade serait réservé aux diplô­mées sor­tant d'IFSI et à leurs col­lègues hos­pi­ta­lières en déta­che­ment. Quant au 1er grade, il com­por­te­rait certes deux classes (nor­male et supé­rieure), mais seules 30% des infir­mières sco­laires seraient éligibles à la classe supé­rieure. « Celles-là même qui se sont bat­tues au sein de l'Education Nationale pour la recon­nais­sance de leur rôle dans la réus­site sco­laire se trouvent clas­sées en des­sous des débu­tantes sor­tant de l'IPSI », ajoute Béatrice Gaultier.
Les négo­cia­tions avec le minis­tère de l'Education Nationale doivent reprendre la semaine pro­chaine, mais les syn­di­cats attendent encore la date de convo­ca­tion. Le SNICS-FSU appelle à mani­fes­ter le 10 jan­vier pro­chain et le SNIES UNSA, qui ne « croit plus dans les mani­fes­ta­tions », pro­pose aux infir­mières de n'assurer que les urgences les mer­cre­dis : « On rou­vrira les portes de l'infirmerie si l'on obtient gain de cause », espère Brigitte Accart.
Elise Pierre

Des moyens pour les urgences

psychiatrie

Dans le contexte difficile rencontré aux urgences psychiatriques de Toulouse depuis plusieurs mois, et alors que les efforts consentis par le CHU (remplacement des postes vacants, augmentation de la prime d'insalubrité, formation des personnels) n'ont pas résolu les tensions dans le service, l'Agence Régionale de Santé a proposé de financer trois postes supplémentaires d'infirmier(e) s. Plus globalement, la Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale (MNASM) doit réaliser une étude sur toute la filière psychiatrique et proposer, dans les mois qui viennent, un diagnostic approfondi ainsi que des mesures adaptées sur une base d'équité à l'échelle de l'établissement. À ces postes financés par l'ARS s'ajoutent 25 000 € attribués afin de prendre en compte le travail administratif supplémentaire induit par la réforme de la psychiatrie.
Les urgences de Purpan.

Les femmes et la discrimination : Dépression, religion, société

Saïda Douki Dedieu, célèbre psychiatre tunisienne, professeur émérite de psychiatrie à la faculté de médecine de Tunis, professeur associée à la faculté de médecine de Lyon, est l’auteure de nombreuses publications. Parmi ses thèmes favoris de recherche on trouve le travail et la santé mentale des femmes.
Il y a encore tant à faire
Le livre, découpé en deux grandes parties, traite de la santé mentale des femmes et de l’impact des facteurs sociaux et religieux qui y sont liés. L’auteure tente de dresser un tableau complet de la condition de la femme à travers le monde et plus précisément celle des femmes musulmanes, fondé sur des études, enquêtes, statistiques et publications internationale, menées dans différents pays. Il apparaît que malgré l’évolution des sociétés sur des dizaines d’année, la condition féminine ne s’est guère améliorée voire pas du tout. À partir de situations sociales très précises, l’analyse démontre le lien entre le statut des femmes et leur santé mentale : dépression et anxiété jusqu’au suicide parfois. De nombreux thèmes sont explorés : le travail, la famille, le mariage, la liberté sexuelle, la virginité, les grossesses hors mariage, la mixité, l’éducation, le travail, la fidélité, la fécondité et l’infertilité, le divorce (forme moderne de répudiation), la ménopause, la situation des femmes atteintes de maladies mentales, la situation des femmes en prison... et enfin les violences contre les femmes (conjugales et domestiques, les mutilations génitales, le crime d’honneur, les femmes kamikazes). Les conclusions sont extrêmement inquiétantes et mettent en évidence de fortes régressions dans certains pays. 

Des valeurs traditionnelles refuges
À la lecture de cet ouvrage, l’émancipation des femmes est un mirage pour un grand nombre d’entre elles tant perdurent les résistances au changement. Question sous-jacente : “comment des sociétés du XXIè siècle tolèrent-elles les discriminations, les atteintes à la dignité et à la liberté des femmes ?”. Pour étayer ses propos, Saïda Douki Dedieu puise dans les écrits et la pensée de philosophes et chercheurs d’opinions diverses qui corroborent pourtant tous la rupture, mentale mais aussi physique. Elle énonce « Un décalage entre une législation émancipatrice et une réalité sociale imprégnée de valeurs traditionnelles » qui maintient les femmes dans un état de sujétion. Les violences sont commises sous l’alibi religieux justificatif. Cet alibi est démonté au travers de citations du Coran et du Prophète et l’auteur souligne que ces violences prennent leur source dans des coutumes culturelles ou traditionnelles. 

Mère, exclusivement
La dernière partie explore les responsabilités des hommes et des femmes, éducatrices quasi exclusives des enfants, sans place pour le père. Quel que soit le pays analysé, l’auteur démontre que la maternité est au cœur du destin féminin. La femme est “faite pour” être mère, pour s’occuper de ses enfants. En font la preuve de récents courants montants qui enferment les femmes dans ce rôle de mère, leur interdisant du même coup toute intégration dans la société professionnelle et donc l’accès à une certaine forme de liberté d’action. 

Quand l’élément féminin est séparé du masculin (absence de mixité), naître fille n’est pas une chance, voire une malédiction. Des injonctions lourdes sont portées par les filles : virginité, chasteté, honneur du clan... très pesant. L’objectif pour les parents est de réduire tout signe de féminité et de marier leur fille au plus vite. L’ensemble de ces contraintes et de ce poid culturel entraînent confusion mentale et perte de repères. À ces contraintes « avouées » s’ajoutent trop souvent inceste et violences sexuelles par des proches alors qu'elle n'est encore qu'une petite fille. L'impact de ces mauvais traitements est inquiétant pour la santé mentale des filles. Elles refusent de raconter, perclues de honte et de réfugient dans des dérives comportementales. Elles fuient dans les drogues et l’alcool, jusqu’au suicide. Les sociétés les plus archaïques continuent à tuer les fœtus filles et les très jeunes enfants de sexe féminin connaissent une mortalité très élevée par manque de soins.

L’occident loin de l’égalité
Même si elles ont pris conscience et subi les assauts des mouvements féministes, les sociétés occidentales ne sont pas exemplaires. Dans le monde du travail, le burn out est mieux reconnu mais hélas très féminin. Ses causes très fréquentes sont le manque de reconnaissance, la surcharge de travail, l’injustice salariale et d’évolution de carrière, le manque de soutien dans l’entreprise comme des proches, des perspectives réduites. Ces dysfonctionnements conduisent à des arrêts de travail de longue durée, des renoncements. La femme revient sur son désir d’autonomie et se« replie » sur sa maladie ou sur un faux choix maternel. L’auteur met également à plat et en cause les théories anglosaxones « maternalistes », les « bonding », les « co-sleeping ». Elle souligne, tout comme Élizabeth Badinter, Sylvia Agacinski ou Martine Storti, à quel point l’émancipation de la femme est en grand danger face à ces théories.

L’angoisse se décline au féminin. Les facteurs de stress aux effets pathogènes sont très nombreux. La dépression est deux fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes et devrait encore progresser dans les vingt prochaines années et est d’après l’OMS le plus lourd fardeau pathologique. Au cours de son exposé, le Professeur Saïda Douki Dedieu ne cesse de démontrer la corrélation entre le statut des femmes et leur santé mentale. Par conséquent, en faisant évoluer l’un, le second s’améliorera.
 
LES FEMMES ET LA DISCRIMINATION
Dépression, religion, société
Pr Saïda Douki Dedieu
Prix : 21,90 €
Ed : Odile Jacob, octobre 2011

Les médecins incités à retarder leur départ à la retraite


Le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, a indiqué jeudi que, parallèlement au relèvement du numerus clausus pour augmenter le nombre de médecins, il proposerait des mesures pour "inciter les médecins sur le point de partir à la retraite à continuer leur activité".
Le ministre fera "des propositions en accord avec les syndicats", a-t-il dit, en marge de la visite à Vorey-sur Arzon (Haute-Loire) de l'entreprise de matériel électronique Interplex-Microtech.
Bertrand a précisé qu'il envisageait notamment un "allègement des charges en fonction des revenus réels et non de façon forfaitaire".
Il a par ailleurs assuré que la prolongation d'activité des médecins se ferait sans "aucune complication administrative".
L'été prochain, 8.000 étudiants seront admis en deuxième année de médecine à la suite du relèvement du numerus clausus, qui était bloqué depuis trois ans, ont annoncé, dans Le Quotidien du Médecin daté de jeudi, Xavier Bertrand et le ministre de l'Enseignement supérieur, Laurent Wauquiez.
Ces mesures ont pour but de remédier à la pénurie de médecins dans certains territoires.
(AFP)

Les Idées claires de Caroline Eliacheff

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Emission Les Idées claires de Caroline Eliacheff
le mercredi de 7h38 à 7h42
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Les idées claires de Caroline Eliacheff

21.12.2011 - 07:38

Suicide à l'hôpital: l'Enfant-Jésus et un psychiatre poursuivis


Dans son action, le demandeur reproche au psychiatre... (Photothèque Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve)
Dans son action, le demandeur reproche au psychiatre d'avoir «commis une erreur majeure dans l'évaluation du risque suicidaire» de sa conjointe. Quant au personnel de l'Hôpital de l'Enfant-Jésus, il allègue qu'il a fait preuve de négligence dans le suivi du protocole de sécurité malgré les menaces de suicide.
PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, JEAN-MARIE VILLENEUVE
(Québec) À la suite du suicide de sa conjointe au département de psychiatrie de l'Hôpital de l'Enfant-Jésus, en décembre 2008, un résidant de Québec intente une poursuite contre l'établissement et le psychiatre traitant de la femme.
Comme elle était le principal soutien de sa famille, le demandeur réclame 1,6 million $ pour la perte de soutien financier et 105 000 $ pour les douleurs que la perte a occasionnées à son garçon de 11 ans et à lui-même.
En mai 2008, la conjointe de Gino Boutin durant 22 ans, une agente correctionnelle et chef d'unité au Centre de détention de Québec, avait été placée en arrêt de travail pour traiter une dépression. En septembre, lorsque sa condition s'est aggravée, elle a été admise au département de psychiatrie de l'Hôpital de l'Enfant-Jésus.
Après une semaine, elle a reçu son congé avec la recommandation de suivre une thérapie de jour. Le matin de son premier rendez-vous, elle a toutefois fait une première tentative de suicide en s'infligeant une blessure à l'abdomen à l'aide d'un couteau.
À la suite de sa deuxième tentative, en novembre, elle a de nouveau été admise au département de psychiatrie de l'Hôpital de l'Enfant-Jésus, sous les soins du second défendeur, le Dr Alain Dion. Le psychiatre a alors diagnostiqué une dépression avec idées délirantes et suicidaires, indique le demandeur dans sa déclaration déposée en Cour supérieure. Une surveillance étroite de la dame a alors été mise en place. Elle prévoyait que tous ses effets personnels seraient gardés sous clé.
Les choses ont été loin de s'améliorer puisqu'en décembre, relate M. Boutin, les propos de sa conjointe sont devenus de plus en plus délirants. Il appert que le personnel infirmier lui répondait de ne pas s'inquiéter, car la patiente se trouvait entre bonnes mains, dans un milieu sûr. À Noël, le demandeur a remis en cadeau à sa conjointe une robe de chambre. Elle a tout de même tenu d'autres propos suicidaires au cours de la journée.
De nouveau alerté par le mari, le personnel infirmier lui a répété que l'hôpital assurait la sécurité de la patiente. Dès le lendemain, toutefois, la défunte a fait sa troisième tentative de suicide, à l'aide du cordon de la robe de chambre. Durant les jours suivants, mentionne
M. Boutin, sa conjointe a répété ses propos suicidaires et le personnel a continué à se montrer rassurant. Le dernier jour de l'année, elle lui téléphone pour l'aviser de son «projet de trouver une solution» afin de mettre fin à ses jours. Le demandeur transmet ces menaces au personnel.
En fin de journée, de narrer M. Boutin, le Dr Dion l'appelle pour lui annoncer que sa conjointe se trouve entre la vie et la mort. À l'arrivée à l'hôpital du conjoint, on l'informe de son décès. M. Boutin a appris qu'elle avait mis fin à ses jours en utilisant le cordon de sa robe de chambre.
Dans son action, le demandeur reproche au psychiatre d'avoir «commis une erreur majeure dans l'évaluation du risque suicidaire» de sa conjointe. Quant au personnel de l'hôpital, il allègue qu'il a fait preuve de négligence dans le suivi du protocole de sécurité malgré les menaces de suicide.

Étudiants étrangers: la mobilisation ne faiblit pas

LEMONDE | 20.12.11

La mobilisation contre la circulaire Guéant qui restreint les possibilités, pour les étudiants étrangers ayant fini leurs études en France, d'y rester pour travailler, ne faiblit pas, au contraire. Estimant la circulaire "moralement inadmissible, politiquement dangereuse et économiquement absurde", une soixantaine d'intellectuels, universitaires, réalisateurs, avocats et médecins ont lancé, le 10 décembre, une pétition réclamant son abrogation et intitulée "Notre matière grise est de toutes les couleurs".

Sur les 2,3 millions d'étudiants en France, 278 000, soit 12%, sont étrangers, ce qui fait de l'Hexagone le troisième pays d'accueil, derrière les Etats-Unis et le Royaume-Uni. La circulaire du 31 mai signée des ministères de l'intérieur et du travail vient préciser une loi du 24 juillet 2006. Celle-ci offre notamment à un étudiant étranger, la possibilité de rester en France à l'issue de son cursus, poureffectuer sa première expérience professionnelle. Ce sont les conditions pourpasser de ce statut d'étudiant à celui de salarié qui sont aujourd'hui restreintes par la circulaire, menaçant potentiellement plusieurs milliers d'étudiants étrangers de reconduite à la frontière.
Les signataires de la pétition, dont Patrice Brun, président de l'université de Bordeaux 3, Anne Lauvergeon, ex-patronne d'Areva, Albert Fert, prix Nobel de physique ou Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, s'engagent à"parrainer" les diplômés étrangers dans leurs démarches et à les "protéger". Pour le cinéaste Romain Goupil, signataire de la pétition, la circulaire Guéant est "le pas de plus, le pas de trop pour désigner l'étranger comme l'ennemi".
De nombreux signataires constatent les effets dévastateurs de la nouvelle orientation du gouvernement. L'économiste Thomas Piketty, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, confie qu'il a déjà "le plus grand mal à faire venir des professeurs de l'étranger, même à titre temporaire". Il raconte ainsi les énormes difficultés rencontrées pour accueillir la spécialiste américaine de l'économie de l'éducation, Caroline Hoxby, qui a dû se contenterd'un visa de tourisme.
Le président de l'université Paris-V-René-Descartes, Axel Kahn, renchérit: "La circulaire Guéant bafoue les traditions de la France et va tout simplement contre les intérêts de notre pays, car ces diplômés parmi les mieux formés au monde contribuent à notre compétitivité intellectuelle et économique." Depuis la publication de cette circulaire, le 31 mai, Axel Kahn a dû intercéder pour une quinzaine de cas, comme celui d'une étudiante marocaine, une des mieux classées de la faculté de pharmacie, qui avait obtenu un CDI dans un laboratoire français et a dû y renoncer.
"SUICIDAIRE"
Dès novembre, la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs, la Conférence des grandes écoles et celle des présidents d'universités avaient saisi le premier ministre. François Fillon leur promettait, dans une lettre du 22 novembre, de réexaminer la situation des étudiants étrangers ayant essuyé un refus. Car au sein de la majorité et du gouvernement, la circulaire Guéant ne fait pas l'unanimité. Laurent Hénart, député UMP de Meurthe-et-Moselle, demande"l'adaptation d'une circulaire susceptible de porter atteinte à l'attractivité de nos universités et au rayonnement des entreprises françaises à l'international". Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, a tenté de rectifier le tir, le 23 novembre, en s'engageant à réexaminer 500 cas litigieux présentés par le collectif du 31 mai, promettant et de les régler d'ici la fin de l'année.
Le collectif du 31 mai, qui défend les étudiants étrangers dont les demandes de permis de séjour ont été rejetées, constate pourtant qu'arrivent chaque jour de nouveaux cas: "Ils sont aujourd'hui 940, dont 300 ont obtenu un accord, les autres sont en attente ou refusés, indique Meriem Kadari, porte-parole de ce collectif. Le traitement au cas par cas ne suffit pas." Le président de la Conférence des grandes écoles, Pierre Tapie, constate des changements trop lents dans la politique du gouvernement. "Si la mise en œuvre des consignes de François Fillon n'est pas assez rapide, cela risque d'anéantir huit ans d'efforts pour reconquérir l'élite des étudiants étrangers", plaide-t-il.
Même si on les entend peu, les chefs d'entreprises s'inquiètent eux aussi. Au Medef, Laurence Parisot affirme suivre "de très près" ce dossier, "le message envoyé à l'international n'étant pas valorisant pour nos entreprises". Lors d'une réunion du syndicat professionnel Syntec Informatique, les entreprises du secteur se sont alarmées du problème de pénurie d'ingénieurs : "Nous recrutons 4000 personnes chaque année, dont 60% de jeunes diplômés", indique Jacques Adoue, directeur des ressources humaines de Capgemini France. "Les dossiers de plus d'une centaine de jeunes ingénieurs que nous souhaitons recruter sont bloqués et ils ont été obligés de repartir chez eux", déplorait-il.
Pour l'économiste Olivier Pastré, l'un des signataires de la pétition "Notre matière grise est de toutes les couleurs", "la France a besoin d'immigration et dissuaderune immigration qualifiée est totalement suicidaire". Le 18 janvier, le Sénat examinera une proposition de résolution de la socialiste Bariza Khiari qui appelle le gouvernement à mieux "prendre en compte dans sa politique migratoire, les nécessités du rayonnement international de la France".
Nathalie Brafman et Isabelle Rey-Lefebvre

C'est loin, la nouvelle Terre ?

Décodage | LEMONDE | 03.12.10

Les parents conducteurs connaissent bien cette excitation des derniers kilomètres. Quand l'approche de la fin du voyage accélère le rythme auquel est posée la question venue de la banquette arrière : "Quand est-ce qu'on arrive ?"Ces derniers mois, les astronomes spécialisés dans la détection des exoplanètes, et les journalistes qui rendent compte de leurs découvertes, semblent parfois saisis de la même agitation.

Le périple a pourtant été l'un des plus rapides de l'histoire des sciences : il a seulement fallu quinze années pour que le nombre de détections de ces mondes lointains, en orbite autour d'autres étoiles que notre Soleil, franchisse, fin novembre, la barre symbolique des 500. Mais ce succès fulgurant n'empêche pas la toute jeune discipline de trembler d'impatience à l'approche de ce qui pourrait déjà ressembler à son but : la découverte, parfois annoncée comme imminente, d'un astre dont les caractéristiques se rapprocheraient de celles de notre Terre et permettraient, qui sait, le développement d'une forme de vie.
Course aux résultats et erreurs. L'engouement du public et la passion des médias pour cette hypothèse, à haute teneur philosophique, n'incite pas forcément à la prudence. La course aux résultats, entre équipes désireuses designer des "premières", peut même pousser au dérapage. Ainsi, en octobre, des astronomes américains ont-ils annoncé, en des termes très peu nuancés, la découverte de Gliese 581 g. Celle-ci présentait beaucoup d'avantages : de proportions assez similaires à notre Terre, elle semblait située au beau milieu de la zone d'habitabilité de son système, c'est-à-dire à une distance de son étoile laissant espérer des conditions favorables à la vie.
Gliese 581 g n'a en fait qu'un gros défaut : elle n'existe sans doute pas. Les astronomes de l'Observatoire de Genève, qui utilisent l'instrument actuel le plus précis pour la détection des planètes extrasolaires, ne la voient pas dans leurs données. Ses découvreurs ont eu beau maintenir leurs calculs, l'exoplanète est passée en quelques jours du statut d'astre de toutes les promesses à celui de fausse nouvelle.
Jeu sur les mots et confusion. Un peu plus tôt, cet été, quelques phrases avaient connu un retentissement mondial assez proche de l'annonce de la découverte de Gliese 581 g. Dimitar Sasselov, membre de l'équipe étudiant le satellite Kepler, lancé en 2009, avait annoncé, au cours une conférence, que l'engin américain avait repéré 140 exoplanètes semblables à la Terre. Le creux du mois d'août avait servi de caisse de résonance à ces affirmations avant que leur auteur, dépassé par leur écho, ne leur donne une tout autre sonorité en les corrigeant radicalement.
M. Sasselov a reconnu avoir eu tort de parler d'exoplanètes là où il ne pouvait encore être question que de candidats à ce statut. Surtout, il a regretté d'avoirutilisé les termes "semblable à la Terre" (Earthlike) là où il aurait dû dire "de taille similaire à celle de la Terre" (Earth-sized). Ce qui n'est pas du tout la même chose : une planète peut être de proportions proches de la nôtre et, pour une série de raisons (distance avec son étoile, absence d'atmosphère, faiblesse ou excès de l'effet de serre, par exemple), ne pas présenter, comme Vénus ou Mars, les couleurs bleue et verte associées à la prolifération de la vie.
"Ce jeu sur les mots, cette référence permanente à notre planète crée une grande confusion dans le public", constate Franck Selsis, du Laboratoire d'astrophysique de Bordeaux (CNRS), qui déplore que le terme de "Super-Terre" ait été adopté pour décrire les exoplanètes jusqu'à dix fois plus massives que notre monde, faites de matière solide et non de gaz comme la géante Jupiter. Une équipe américaine a ainsi annoncé, jeudi 2 décembre dans Nature, qu'elle avait réussi, pour la première fois, à obtenir des informations sur l'atmosphère d'un de ces astres, GJ 1214b, qui n'excluaient pas la présence de vapeur d'eau.
La prouesse technique, grâce au Very Large Telescope de l'Observatoire européen austral (ESO), est considérable. Mais le terme de "Super-Terre" dit mal à quel point GJ 1214b, 2,6 fois plus grande et 6,5 fois plus massive que notre planète, peut en être dissemblable. "Il y a un "trou" dans le système solaire,explique Franck Selsis. Il n'y figure aucun astre entre la masse de la Terre et celle, 14 fois supérieure, de Neptune. Du coup, nous avons beaucoup de mal àimaginer combien ces exoplanètes, nombreuses ailleurs, peuvent êtreradicalement différentes de la nôtre."
Une discipline qui explose. Cela n'inquiète pas Didier Quéloz, codécouvreur, en 1995, de la première exoplanète officiellement considérée comme telle. Pour l'astronome suisse de l'Observatoire de Genève, ces erreurs et ces approximations "font partie de la vie de la science". La curiosité du public pour les mondes lointains leur vaut simplement un retentissement plus fort que dans d'autres secteurs. "Notre discipline a explosé depuis dix ans, dit-il. Les observations sont si difficiles, on se situe tellement aux limites de la connaissance et des instruments, qu'il y aura encore beaucoup de tâtonnements et de querelles d'interprétation."
Pour repérer dans le lointain la présence d'exoplanètes noyées dans la lumière de leur étoile, les astronomes sont obligés, la plupart du temps, d'avoir recours à des modes de détection indirects. Les découvertes ne représentent parfois qu'un point sur une sinusoïde, à partir duquel nombre de déductions contradictoires sont possibles. "Je vous parie que le jour où l'on trouvera vraiment une autre Terre habitable, on ne s'en rendra pas compte sur le moment, ajoute Didier Quéloz. Auparavant, on en aura annoncé une centaine qui ne le seront pas."
2011 promet des révélations. Le jour de la découverte de la première planète "de taille similaire à la Terre" approche en tout cas. Le satellite Kepler, qui a pris le relais du Français Corot, est en mesure d'en révéler plusieurs cas dès 2011. Les statistiques jouent en faveur des astronomes : des études ont montré que les exoplanètes cousines de la Terre seraient majoritaires dans notre galaxie, où elles se compteraient par milliards.
Ces astres une fois identifiés, comment s'assurer que la vie est possible sur l'un d'eux ? "Il faudrait des mesures très précises de la composition de leur atmosphère, dit Jean Schneider, de l'Observatoire de Paris-Meudon (CNRS).Cela ne sera possible qu'avec une nouvelle génération d'engins spatiaux, ou peut-être d'énormes télescopes terrestres."
Pour l'heure, ces instruments, au-delà de nos capacités techniques actuelles, n'existent que sous la forme de projets. Ils seront difficilement opérationnels avant une quinzaine d'années. D'ici là, seront lancés plusieurs engins voués àaccroître le nombre de découvertes, qui pourrait plafonner aux alentours des 2 000 exoplanètes en 2020. Le passage du quantitatif au qualitatif, et à la démonstration de la réalité d'une vie extraterrestre, n'aura pas lieu avant cette date.
Tant pis pour les impatients : la route sera encore longue.
Jérôme Fenoglio