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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

samedi 18 septembre 2010



L'alcoolisme, on peut le soigner
16.09.10

Jacqueline, 46 ans, est hospitalisée depuis le 24 août à l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne). Elle a fait une rechute après deux ans d'abstinence à l'alcool. Jacqueline (qui souhaite garder l'anonymat) prenait régulièrement du topiramate (un antiépileptique connu sous le nom d'Epitomax) mais l'a arrêté cet été, parce qu'elle passait, dit-elle, de "très bonnes vacances" en Espagne avec sa fille de 11 ans, qui ne vit pas avec elle. "Je n'aurais pas dû", concède-t-elle.

Lorsqu'elle rentre seule, dans son petit appartement, à Paris, elle ne peut "plus supporter ça". Prise de bouffées d'angoisse, elle court acheter vodka, gin... et avale trois litres d'alcool pur. Elle rappelle alors le médecin de l'hôpital Paul-Brousse - où elle avait été suivie durant trois semaines, en 2008 -, qui l'hospitalise aussitôt. Jacqueline, qui vient de reprendre son travail d'infirmière, est bien décidée à s'en sortir.

Le topiramate, avec lequel est traitée Jacqueline, est l'une des nouvelles réponses thérapeutiques présentées lors du 15e congrès mondial sur la recherche en alcoologie, l'Isbra, qui s'est achevé jeudi 16 septembre à Paris. L'objectif est à chaque fois de donner le médicament le plus adapté au patient. Avec le topiramate, Jacqueline dit ne pas ressentir d'effets secondaires.

Longtemps retardée par le peu d'intérêt que lui portait l'industrie pharmaceutique, la recherche thérapeutique explore désormais de nombreuses pistes. De nouvelles molécules, tel le nalmefene - qui agit sur le cerveau -, sont testées. L'objectif n'étant pas dans ce cas l'abstinence mais la "consommation contrôlée", ce qui suscite beaucoup de questions. Autres pistes prometteuses, le recours à la génétique et aux neurosciences. Par ailleurs, les médecins constatent que des médicaments conçus pour traiter des addictions, comme le tabac ou le cannabis, sont aussi efficaces contre l'alcool. Ce dernier reste la substance psycho-active la plus consommée en France, même si les spécialistes notent une diminution. C'est l'addiction qui provoque le plus de dommages somatiques, psychiatriques et sociaux.

L'image de l'alcool commence doucement à changer dans l'opinion publique. "Avant, c'était un fléau social qui n'intéressait pas les médecins. Depuis une dizaine d'années, c'est devenu une addiction. Il y a eu une modification de la représentation sociale au début des années 2000", précise le professeur Michel Reynaud, président du comité d'organisation de l'Isbra et chef du département de psychiatrie et d'addictologie de l'hôpital Paul-Brousse.

Le corps médical insiste pour parler de maladie alcoolique et sur le fait que cela touche toutes les catégories sociales. "Ce n'est ni un vice, ni une tare, ni un manque de volonté", insistent les médecins. La France a toujours un problème avec l'alcool : "Le fait de ne pas boire n'est pas normal, souvent mal vu", estime le professeur Michel Lejoyeux, chef de service d'addictologie et de psychiatrie à l'hôpital Bichat, à Paris, président de la Société française d'alcoologie (SFA).

"De l'autodestruction"

"C'est comme un bug en informatique. Votre cerveau est programmé pour s'alcooliser : je bois, même si je n'en ai pas envie, raconte Gilles, 47 ans, soigné à l'hôpital Bichat pour la huitième fois. J'ai pris conscience en 2007 que ce n'était pas ma vie. J'étais à la rue, dès qu'on avait un peu d'argent, on allait boire, c'était de l'autodestruction." Gilles a certes rechuté, mais il reconnaît avoir fait beaucoup de progrès depuis qu'il est arrivé dans le service.

"On réagit tous différemment par rapport à l'alcool, note le docteur Amine Benyamina, psychiatre addictologue à l'hôpital Paul-Brousse. Outre les facteurs biologiques, la part génétique est très importante. Cette influence multi-génétique interagit avec les facteurs environnementaux tels que le stress, le deuil, des traumatismes de l'enfance."

Bien souvent, "l'alcool est un symptôme, la partie émergée de l'iceberg", témoigne Jacqueline. D'où la nécessité d'une approche médicale, psychologique et sociale. "On travaille beaucoup sur l'après-hospitalisation, en donnant toujours au patient la possibilité de revenir, même s'il rechute une demi-heure après sa sortie", précise Djilali Belghaouti, responsable de l'organisation des soins au service d'addictologie de l'hôpital Bichat.

C'est le cas de Joana, 59 ans, qui a rechuté malgré un séjour en clinique. Aujourd'hui soignée à Bichat, elle devrait quitter l'hôpital dans les prochains jours. "Je veux exclure l'alcool de ma vie. Mais c'est parfois difficile de refuser un verre, parfois mal vu", dit-elle. Pour le professeur Lejoyeux, "quand un patient pousse la porte de consultation en alcoologie, la moitié du chemin est faite".

Sur le Web : Sfalcoologie.asso.fr et
Anpaa.asso.fr.


Bientôt un essai clinique du baclofène

Depuis la parution du livre du docteur Olivier Ameisen, Le Dernier Verre (Editions Denoël, 2008), le baclofène, vieux médicament (Le Monde du 12 novembre 2008), est de plus en plus utilisé pour soigner les personnes souffrant de maladie alcoolique. Bien que ne bénéficiant pas d'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le sevrage alcoolique, ce relaxant musculaire suscite l'intérêt des patients et des médecins. Un essai clinique soutenu par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) va être lancé dans les semaines à venir, indique le professeur Michel Detilleux, responsable de l'unité d'alcoologie de l'hôpital Cochin et coordinateur de l'essai.

L'essai thérapeutique va impliquer 210 patients alcoolo-dépendants, en plaçant 105 des participants sous traitement et 105 sous placebo, avec une posologie de 90 mg par jour. Les premiers résultats devraient être connus d'ici dix-huit mois, selon le spécialiste. Pour répondre à certaines critiques montrant que la posologie était trop faible, la dose pourrait être augmentée chez certains patients. Mais, pour la plupart des addictologues, aucun médicament ne règle à lui seul la prise en charge de la dépendance.


La consommation en France et ses conséquences

Décès. 45 000 décès sont attribuables à l'alcool chaque année. C'est la troisième cause de mortalité, après les maladies cardio-vasculaires et le cancer. Il est responsable de 30 % des accidents mortels (2 200 décès par an) ; il est impliqué dans 40 % des crimes et délits et dans 30 % des violences conjugales.

Consommation
. Elle était de 12,3 litres d'alcool par adulte et par an en 2008 (l'équivalent d'un peu moins de trois verres de vin, par jour et par habitant de 15 ans et plus). Elle diminue de 1 % par an, depuis quarante ans. La France reste au 5e rang européen.

Dépendance
. 10 % des adultes (de 4 à 4,5 millions) ont un rapport problématique à l'alcool, soit 15 % d'hommes et 5 % de femmes ; de 1,5 à 2 millions sont alcoolo-dépendants. Chez les adolescents, entre 2000 et 2010, l'usage régulier est passé de 10,9 % à 8,9 %. Mais les expérimentations et les ivresses occasionnelles augmentent depuis 2003.

Sources : Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie ; Société française d'alcoologie.





Un virus présent dans le syndrome de fatigue chronique

Une étude réalisée par une équipe de Harvard aux États-Unis (Shyh-Ching Lo et coll.) trouve une forte association entre un diagnostic de syndrome de fatigue chronique (SFC) et la présence de séquences de gènes de virus MLV-like.


CE RÉSULTAT confirme la publication antérieure de l’équipe de Lombardi et coll. qui avait détecté la présence d’un virus XMRV, proche de MLV (« Science », octobre 2009). Toutefois, « bien que l’association soit statistiquement forte, elle ne prouve pas que ces rétrovirus sont à l’origine de SFC », exprime Shyh-Ching. L’étude montre aussi que les séquences virales MLV-like sont présentes chez une petite fraction de sujets sains (donneurs de sang).

Le virus MLV (Murine Leukemia Virus) est un type de rétrovirus connu pour causer des cancers chez la souris. Dans cette dernière étude, des séquences de gènes gag ont été identifiées dans des échantillons sanguins de 32 patients parmi 37 souffrant d’un SFC (87 %), et chez 3 donneurs de sang en bonne santé parmi 44 (7 %).

Ces proportions sont voisines de celles publiées en 2009 par Lombardi. Le résultat reste controversé car d’autres travaux réalisés aux États-Unis, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas n’ont pas montré une présence significative de virus XMRV ou MLV-like dans le sang de patients présentant un SFC.

Pour sa part, le XMRV (Xenotropic Murine Leukemia Virus-related virus) a été découvert pour la première fois en 2006 chez des patients souffrant de cancer de la prostate. On sait que XMRV est étroitement apparenté au groupe des MLV.

Au Center for Disease Control américain, on se pose la question d’une transmission de ces virus via les dons de sang. L’éventualité de cette transmission ne peut être exclue, même si elle paraît peu probable et même si elle n’a jamais été identifiée. Une étude est en cours aux États-Unis pour déterminer la prévalence des XMRV et des MLV dans le sang des donneurs, indiquent les experts.

Par ailleurs, le schéma d’apparition des cas de SFC est loin de celui d’une maladie contagieuse, même si la survenue de la maladie est un peu plus fréquente chez les personnes apparentées à un cas index.

› Dr BÉATRICE VUAILLE
« Proceedings of the National Academy of Science », 23 août 2010.
Quotimed.com, le 24/08/2010



NEUROLOGIE
Des spécialistes du cerveau alertent sur l'urgence à relancer la recherche
Anne Jeanblanc
16/09/2010

Le cerveau manque de têtes chercheuses ! C'est ce qu'estiment la Société des neurosciences, la Société française de neurologie et la Fédération pour la recherche sur le cerveau qui organisent, jeudi, au Collège de France à Paris, un colloque baptisé "Priorité cerveau". Leur objectif est de relancer l'idée d'un "plan cerveau" pour la prise en charge de l'ensemble des maladies neurologiques et psychiatriques. "Il faut renforcer la recherche fondamentale en lien avec les neurologues et les psychiatres, afin de mieux comprendre le cerveau pour pouvoir le réparer", estime le neurobiologiste Étienne Hirsch, de l'Institut du cerveau et de la moelle épinière à Paris.

Actuellement, les spécialistes estiment qu'en Europe, 127 millions de patients sont touchés par une ou plusieurs maladies du cerveau, dont environ 15 millions en France. En Europe toujours, 35 % des dépenses de santé sont liées à ces pathologies et, rien qu'en France, les coûts induits par les maladies mentales et neurologiques atteignent les 40 milliards d'euros par an. "Et pourtant, les investissements pour la recherche dans les affections du système nerveux ne s'élèvent qu'à 4 milliards d'euros pour l'ensemble de l'Europe", regrette le Pr Olivier Lyon-Caen, de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Les deux tiers de ces dépenses sont attribués aux troubles psychiatriques. La recherche en psychiatrie dispose de moins de 2 % du budget global de la recherche en France, alors que les maladies mentales touchent 18 % de la population.

Coordonner toutes les actions existantes
À l'occasion du colloque "Priorité cerveau", les spécialistes vont présenter un ouvrage portant le même titre*, qui établit un état des lieux de la recherche et qui expose les dix priorités sur lesquelles devrait être fondé le "plan cerveau". Parmi elles, les neurologues "exigent une ligne de financement propre pour la recherche sur le cerveau qui pourrait émaner d'une fondation dédiée". Ils souhaitent une réorganisation de la recherche, afin de "la rationaliser, la coordonner et lui donner une plus grande lisibilité nationale et internationale". À l'image de l'Institut national du cancer (INCa), ils proposent la création d'un "grand institut national sur le cerveau et ses maladies avec un réel plan cerveau fédérant les nombreuses actions existant déjà, mais non coordonnées (plan Alzheimer, AVC, autisme, etc.), et associant tous les acteurs de la recherche et de la société".

Parmi les autres priorités, ils placent en tête de la liste le renforcement de la recherche fondamentale sur la connaissance du développement, du vieillissement et de la physiologie du cerveau, puis le renforcement du caractère pluridisciplinaire de la recherche en neurosciences, avec la chimie, les nanotechnologies, les mathématiques et les sciences humaines et sociales. De plus, ils suggèrent de créer des centres de recherche "translationnelle" entre la recherche fondamentale, la neurologie et la psychiatrie. "Il suffirait de dix à quinze centres en France, situés idéalement dans les grandes structures hospitalo-universitaires", selon le Pr Lyon-Caen. Enfin, pour faciliter l'accès aux données et donc rendre la recherche plus efficace, les neurologues demandent la création de centres de gestion, de stockage et d'analyse des données cliniques, d'imagerie et biologiques pour les maladies neurologiques et psychiatriques.

* Ouvrage collectif sous la direction du Pr Olivier Lyon-Caen et d'Étienne Hirsch, éditions Odile Jacob, 432 pages, 29 euros.




La conscience de soi se trouve juste derrière les yeux

16.09.10

Une région particulière du cerveau, située juste derrière les yeux, paraît être plus développée chez des personnes ayant une plus grande capacité d'introspection, selon des travaux britanniques publiés jeudi aux États-Unis.

Ces chercheurs sont parvenus à cette conclusion après avoir soumis un groupe de trente-deux personnes en bonne santé à un test destiné à évaluer leur degré de confiance dans leurs réponses à des questions. Ils ont ensuite examiné le cerveau des participants à l'aide d'un système d'imagerie par résonance magnétique (IRM).


UN INDICATEUR DE LA CAPACITÉ À RÉFLÉCHIR SUR SOI-MÊME


Les auteurs de la recherche, conduite par le professeur Geraint Rees, de l'University College de Londres, ont conclu que le volume de matière grise dans la partie antérieure du lobe frontal du cerveau est un important indicateur de la capacité de réflexion sur elle-même de la personne.

Cette partie du cerveau est le siège de différentes fonctions cognitives supérieures comme celles du langage, de la mémoire de travail et du raisonnement. C'est également l'une des zones du cerveau qui ont subi le plus important développement au cours de l'évolution des primates jusqu'aux hominidés.

Dans l'avenir, cette découverte pourrait aider les neurologues à mieux comprendre comment certains traumatismes du cerveau affectent la capacité d'un individu à réfléchir sur ses propres pensées et actions, estiment les auteurs de l'étude, parue dans la revue américaine Science datée du 17 septembre. Une telle compréhension pourrait potentiellement aboutir au développement de thérapies ciblées pour des victimes d'attaque cérébrale ou ayant subi un important traumatisme du cerveau et qui ne peuvent de ce fait comprendre leur état.


Sous la cendre.
Figures de Cendrillon
Anthologie de Nicole Belmont et Élisabeth Lemire

Multiples Cendrillons

Établie par Élisabeth Lemire et Nicole Belmont, une des spécialistes du conte traditionnel, cette anthologie est une somme des différentes versions du conte de Cendrillon avec quelques unes de ses variantes (la chatte des cendres du sud de l’Europe, la vache des orphelins d’Europe centrale, la Noix du Québec, …). Tous les continents ont pratiqué l’art de cendrillonner, et tous avec un talent particulier.
L’époque moderne n’est pas en reste : l’ouvrage se clôt par une Cendrillon à la sauce utilitariste très drôle écrite par Dickens pour protester contre les adaptations et trahisons des contes. Il conclut à son pastiche : « Le Vicaire de Wakefield se montrait le plus sage quand il disait qu’il était lassé d’être toujours sage. Le monde est trop envahissant pour nous, tout au long de la vie. Ne touchons pas à ces précieuses et respectables échappées ». C’est dire si le volume est savamment construit pour se clore ainsi sur une demande de fixité et de respect de la fantaisie du conte.

Le mythe ou le thème de Cendrillon se construit ainsi de conte en conte, variant le personnage à l’infini. Ce livre est à lire comme on écoute les variations en musique, en se laissant porter par le thème, en souriant aux écarts, à l’accent propre. On y trouve quelques savoureuses transcriptions d’accents de nos provinces françaises, comme cette version du Poitou : « I aurait fait encore pyaisir d’aller à tchio bal aussi. A restait dans son p’tit coin, dans la cheminaï, auprès la cendre ». Versions courtes à la sobriété belle, versions longues à la complexité étonnante, il semble que le sujet soit infini. La marraine est tantôt animal, tantôt fée, ou mère défunte, ou Sainte Vierge. Les épreuves données à la malheureuse Cendrillon sont d’une grande ingéniosité maligne et les animaux qui lui viennent en aide sont charmants à souhait. L’équipage arrive de mille manières différentes (de la terre, du ciel, dans des noix et noisettes, fabriqué par des dindons…). La fin est parfois sanglante. Il arrive aussi que Cendrillon elle-même soit celle qui met à mort la mère pour que son père épouse la femme qu’elle lui a choisi.

La préface de Nicole Belmont nous laisse un peu sur notre faim en retraçant très rapidement le « cycle de Cendrillon » pour en reconstruire un historique possible : un prototype simple (« La Vache des orphelins ») qui serait issu du Moyen-Orient, qui se serait répandu aussi bien en Chine (première version écrite attestée du IXe siècle de notre ère) qu’en Europe, Amérique et Afrique. Cette diffusion s’accompagne de complexification en récupérant souvent d’autres récits types, ou en étant à l’origine d’autres contes, comme Peau d’âne. Finalement, Nicole Belmont suggère qu’autant qu’une évolution historique, on peut y lire « un itinéraire psychique, celui des filles face à leur mère ».

Les postfaces, l’une de Nicole Belmont l’autre d’Elisabeth Lemire, explorent la saveur et les traits distinctifs du conte ou du mythe, parfois dans ses prolongements psychanalytiques. A travers quelques thèmes comme celui des cendres, ou de la pantoufle ou touche à la racine du charme qui nous a retenu durant la lecture de toutes ces variations : l’ombre, la mort et l’immobilité (les cendres) font place progressivement (trois étapes sont nécessaire) à une lumière de plus en plus éblouissante et à des objets transparents – par leur matière comme par leur sens.

Anne-Marie Mercier-Faivre
(avril 2008 )


mercredi 15 septembre 2010






Histoire de la psychanalyse en Argentine

Une réussite singulière


Mariano Ben Plotkin/traduction Anne-Cécile Druet

« Quiconque, en société, dans une grande ville d'Argentine, oserait mettre en doute l'existence de l'inconscient ou du complexe d'Œdipe, se trouverait dans la même position que s'il niait la virginité de la Vierge Marie face à un synode d'évêques catholiques. » Au carrefour de l'histoire intellectuelle, politique, culturelle et sociale, l'étude rigoureuse de Mariano Ben Plotkin montre l'originalité de l'implantation de la psychanalyse en Argentine. Face aux Etats-Unis et à l'Europe, plus particulièrement à la France, traversant l'expérience péroniste, violentée par la dictature militaire, la psychanalyse s'est imposée d'une manière singulière dans ce pays. Elle y rencontre un engouement populaire unique au monde qui en fait une base fondamentale de la vie en Argentine.

Mariano Ben Plotkin est historien, docteur en histoire à ['université de Californie (Berkeley), chercheur au CONICET et président de l'Instituto de Desarrollo Econômico y Social en Argentine. Il a publié de nombreux livres dont : Argentines on thé Couch. Psychiatry, Society and thé Stace in Argentins, 1880-1970, University of New Mexico Press, 2003 ; La Privatizaciôn de la educaciàn superior y las ciencias sociales en la Argentina. Un estudio de las carreras de Psicologia y Economia, Buenos Aires, CLACSO, 2006 ; Thé Transnational Unconscious. Essays on Psychoanalysis anct Transnationalism, Londres, Palgrave-Macmillan, 2009, en collaboration avec Joy Damousi.





Sorciers et psychanalyse

Pendant qu’en Europe on enchaînait les fous, des peuples primitifs les soignaient selon des méthodes très proches de la psychanalyse, explique Lévi-Strauss dans cet article publié au Courrier en juillet-août 1956, où il dresse des parallèles entre les rituels chamanistiques et les psychothérapies modernes.

À la plupart d'entre nous, la psychanalyse apparaît comme une conquête révolutionnaire de la civilisation du vingtième siècle ; nous la plaçons sur le même plan que la génétique ou la théorie de la relativité. D'autres, plus sensibles sans doute au mauvais usage de la psychanalyse qu'à son véritable enseignement, persistent à la considérer comme une extravagance de l'homme moderne. Dans les deux cas, on oublie que la psychanalyse n'a fait que retrouver, et traduire en termes nouveaux, une conception des maladies mentales qui remonte probablement aux origines de l'humanité et que les peuples que nous appelons primitifs n'ont pas cessé d'utiliser, souvent avec un art qui étonne nos meilleurs praticiens.

Il y a quelques années, des ethnologues suédois ont recueilli et publié un très long rituel de guérison employé chez les Indiens Cuna de Panama, dans les cas d'accouchement difficile. Ce rituel consiste en un récitatif que le sorcier de la tribu – ou, comme disent les spécialistes, le chaman – déclame devant la patiente et pour son bénéfice. Il lui explique que son mal provient de l'absence momentanée de l'âme qui préside à la procréation ; car les Cuna croient en l'existence d'une multitude d'âmes, chacune préposée à une fonction vitale particulière. Cette âme a été attirée dans l'au-delà par des esprits malfaisants ; le sorcier raconte à la malade, avec un grand luxe de détails, comment il entreprend un voyage surnaturel à la recherche de l'âme perdue ; quels obstacles il rencontre ; à quels ennemis il s'oppose ; comment il les domine, par la force ou par la ruse, avant d'atteindre la prison de l'âme captive, pour finalement la libérer et lui faire réintégrer le corps souffrant et étendu.

La cure chamanistique, précurseur de la psychanalyse
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La santé déterminant de l’âge de la retraite

L’espérance de vie, l’espérance de vie en bonne santé et l’âge de départ en retraite varient de manière importante et inégalitaire selon les professions en France, selon une analyse publiée dans « Retraite et Société », la revue de la Caisse nationale d’assurance vieillesse.

En France, l’espérance de vie est l’une des plus élevées au monde et dépasse les 80 ans depuis le début des années 2000. Mais les différences d’espérance de vie entre catégories socio-professionnelles sont également « très fortes, parmi les plus grandes en Europe », expliquent Emmanuel Cambois (INED), Thomas Barnay (CNRS) et Jean-Marie Robine (INSERM) dans ce numéro consacré à l’état de santé des travailleurs âgés (n° 59, août 2010).

À 50 ans, en 2003, l’espérance de vie des professions les plus qualifiées atteignait 32 ans pour les hommes, près de 5 ans de plus que celle des ouvriers. Chez les femmes, l’écart était de 2 ans, avec une espérance de vie de 36 ans pour les plus qualifiées. Les différences sont encore plus sensibles quand on parle de bonne santé perçue : l’espérance de vie à 50 ans est alors de 23 ans pour les hommes les plus qualifiés, contre 14 ans à peine pour les ouvriers.

Ces inégalités se retrouvent à la retraite, puisque, à 65 ans, l’espérance de vie en bonne santé est de 11,1 ans pour les professions les plus qualifiées (11,6 pour les femmes) et de 6,5 ans pour les ouvriers (7). Les auteurs relèvent qu’à partir de 50 ans, les ouvriers vont passer plus de la moitié de leur vie en mauvaise santé, contre un tiers pour les plus qualifiés.

Les inégalités sont aussi liées à l’occupation : de 25 à 28 % des quinquagénaires qui ont un emploi s’estiment en mauvaise santé, contre 40 % des chômeurs qui recherchent un emploi et 75 % des inactifs. Pour les chercheurs, l’état de santé est l’un des déterminants les plus importants de l’âge de cessation d’activité. C’est particulièrement le cas des ouvriers, dont la dégradation des conditions de santé est plus élevée que pour les autres catégories, mais pour qui le choix de partir en préretraite est particulièrement coûteux. Pour eux, l’arbitrage est davantage lié à l’état de santé qu’à des raisons personnelles, contrairement aux cadres.

Ces inégalités se retrouvent dans l’ensemble des pays européens, précisent les auteurs, qui concluent que, « au-delà des statuts administratifs d’activité ou d’état de santé se pose la question des possibilités réelles de poursuite d’activité professionnelle de certaines catégories compte tenu de leur état fonctionnel, de leurs conditions de vie et des conditions d’exercice de leur emploi ». Une contribution au débat sur les retraites, si tant est qu’il soit encore ouvert.

› R. C.

Quotimed.com, le 15/09/2010



Les sédatifs associés à une mortalité accrue

Le risque que posent ces médicaments plaide en faveur des traitements psychologiques de l'insomnie et de l'anxiété

Par Jean Hamann


Les sédatifs prescrits pour traiter l'insomnie et l'anxiété augmenteraient le risque de mortalité de 36 %, révèle une étude publiée dans le numéro de septembre de la Revue canadienne de psychiatrie. C'est ce que conclut la professeure Geneviève Belleville, de l'École de psychologie, après avoir analysé des données recueillies pendant 12 ans auprès de 14 117 Canadiens. «L'augmentation du risque de mortalité est faible, mais significative, souligne la chercheuse. Les médecins devraient en être conscients et encourager leurs patients à recourir aux traitements non pharmacologiques de l'insomnie et des troubles anxieux.»
   
Jusqu'à maintenant, les études portant sur le lien entre les sédatifs et la mortalité étaient arrivées à des conclusions contradictoires. La professeure Belleville a eu l'idée de faire appel aux données de l'Enquête nationale sur la santé de la population, réalisée par Statistique Canada, pour faire la lumière sur la question. Ces données incluent des renseignements sur les caractéristiques sociodémographiques, les habitudes de vie et la santé, incluant la dépression, de Canadiens âgés de 10 à 102 ans, interrogés tous les deux ans, entre 1994 et 2007.
   
Pendant cette période, entre 3 et 6 % des répondants ont déclaré, au moins une fois, avoir fait usage de médicaments pour traiter l'insomnie ou l'anxiété durant le mois précédent l'enquête. Dans ce groupe, le taux de mortalité atteint 15,7 % alors qu'il se situe à 10,5 % chez les répondants qui ont déclaré ne pas avoir utilisé de tels médicaments. La différence entre les deux groupes est surtout marquée chez les 55 à 74 ans.
  
En tenant compte des facteurs personnels pouvant avoir une incidence sur la mortalité (consommation d'alcool et de tabac, santé physique, dépression, activité physique), les chercheurs ont établi que la prise de sédatifs entraînait une augmentation de 36 % du risque de décès. Cette hausse équivaut au risque de mortalité qui pèse sur les fumeurs occasionnels.
   
Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer le lien entre les sédatifs et la mortalité. Ces médicaments influenceraient le temps de réaction, la vigilance et la coordination, favorisant ainsi les accidents ou les chutes. Ils auraient aussi un effet inhibiteur sur le système respiratoire et sur le système nerveux central. Dans ce dernier cas, le jugement des personnes pourrait être altéré, ce qui augmenterait leur propension au suicide.
   
«Les sédatifs ne sont pas des bonbons et il ne faut pas croire qu'il est anodin d'en consommer, résume Geneviève Belleville. Comme les thérapies comportementales cognitives donnent de bons résultats dans le traitement de l'insomnie et de l'anxiété, les médecins devraient systématiquement discuter de cette option avec leurs patients. Combiner une approche pharmacologique à court terme à un traitement psychologique constitue une stratégie prometteuse pour diminuer l'anxiété et favoriser le sommeil.»







Les doigts dans la prison
portrait
13/09/2010

Olivier Maurel. Un peu cow-boy, un peu samouraï, le détonant directeur de la centrale de Poissy fait corps avec la taule.

Par SONYA FAURE

 
Il est en prison depuis vingt ans. Il connaît la vie à l’ombre et les nuits trop claires, aveuglées par les projecteurs des miradors. Mais lui a les clefs. Olivier Maurel est directeur de la centrale de Poissy (Yvelines), où dorment les longues peines. Il publie un livre, le Taulier, cerné par les clichetons littéraires et un sens de la litote qui parfois laisse coi («J’ai gardé longtemps l’image et l’odeur de ce détenu en train de se dévorer au milieu de ses excréments. Triste spectacle…»). Mais une parole inattendue et rare venant d’une institution, la pénitentiaire, surnommée à juste titre «la petite muette».

Olivier Maurel a fait relire son texte à sa hiérarchie. Il écrit: «Ne cherchez pas dans ce livre de message politique ou socialement connoté.» On y trouve une prison d’une violence extrême et le profil imprévu d’un commis de l’Etat. Aux journalistes, le service com de l’administration pénitentiaire dit : «Olivier Maurel est un directeur de prison atypique.»

Il est élégant, un peu raide, cheveux ras. Mais Maurel se lit en Lino Ventura, peur de rien et respect pour les vieux braqueurs compris. Un peu cow-boy aussi. «Ah non, pas cow-boy ! C’est à l’opposé de ce que je suis.» L’adjectif revient pourtant souvent à son propos, il le sait. «Il est très sympathique mais un peu barbouze», juge un collègue. «Il incarne une certaine droite pénitentiaire. Un patron de choc qui pense qu’il ne faut jamais faire croire aux détenus que l’administration n’est pas la plus forte à tout moment», estime Jean-Michel Dejenne, représentant CGC du personnel de direction.

Dans la cour de promenade de Poissy, Olivier Maurel lance à un détenu : «Ça s’est réglé votre affaire ?»«C’est bon, merci patron», dit l’autre. Sur 230 «pensionnaires», comme il dit parfois, 140 ont tué. Depuis qu’il est arrivé, des caméras ont été installées, mais les parloirs rallongés. «Olivier Maurel est respecté par les détenus et par le personnel : c’est un homme d’action, mais il a le sens de l’écoute», assure Pierre Raffin, son ancien supérieur à Moulins. Un surveillant confirme : «Il est derrière ses hommes, comme un militaire.»

Maurel est marathonien, Maurel aime les sports de combat. Alors, des champions de boxe thaï font des galas à la centrale et un des prisonniers prépare les 20 kilomètres de Paris. Lors de la dernière fête de la musique, il a pris la place d’un détenu à la batterie et joué My Sharona de The Knack. Maurel aime le hard rock et la moto (que sa seconde femme, avocate, lui a fait arrêter). Il a le corps couvert de tatouages qui l’obligent, l’été, à travailler en manches longues. Des porte-bonheur chinois, des maximes de moines Shaolin. Sur le bras droit : «L’homme sage et courageux renaîtra de ses cendres

Il y a d’abord eu Grasse, premier poste ou presque de cet homme grandi dans des villages de l’Aude, entre un père aux valeurs «rouges rouges»et une mère gaulliste-nationaliste-catho, tous deux enseignants. «Comparée à la répression des fraudes ou aux douanes, la matière pénitentiaire me semblait celle qui allait m’ennuyer le moins.» Grasse, donc, l’épisode dont les collègues parlent encore avec une voix plus atone.

C’est le matin, Maurel court dans un parc d’Antibes. Derrière lui, des aiguilles de pins craquent. Violent coup sur la nuque, sérieux tabassage. Il entend une lame qu’on sort d’un cutter. S’évanouit. Se réveille avec la peau taguée à l’aérosol : «DEAD». L’agression a été commanditée par un détenu de 20 ans que Maurel avait placé 45 jours au mitard. «A l’époque, j’étais d’avantage dans une logique d’opposition que de compréhension. J’avais 25 ans, j’étais vif.» Un collègue commente : «Une telle agression ne m’est jamais arrivée, ce n’est peut-être pas un hasard.» Maurel : «C’est sûr qu’à rester le cul dans son bureau, on ne risque pas la prise d’otage.» Qu’il a aussi connue. Pierre Raffin, qui l’a vu descendre dans la cour de promenade de la centrale de Moulins négocier avec des détenus en état de mutinerie, parle d’un «courage extrême».

Olivier Maurel s’est formé à la gestion de crise lors de stages avec le Raid et le GIGN et cite l’Art de la guerre de Sun Tzu. Il a été chef du bureau du renseignement pénitentiaire, chargé d’amasser les informations sur les détenus jugés les plus dangereux, les terroristes. Lui qui adore Hemingway et préfère Jankelevitch à Foucault, lui qui a vu 43 fois l’Année du dragon avec Mickey Rourke mais n’a pas voulu se plonger dans un trop proche Prophète, passe son temps libre à écrire un polar inspiré de ses analyses comportementales de serial killers. Une seule chose le fait reculer : les prisons de femmes. «Trop trash. Vous n’imaginez pas les propos crus qu’elles peuvent tenir.»

Il a l’âme d’un «centralien» comme on dit à la pénitentiaire, parce que dans les établissements des longues peines, «on a le temps de connaître les détenus, de discuter». «Parler liberté avec un homme qui a déjà fait vingt piges, ça a quand même une autre gueule qu’entendre un intellectuel blasé sur le sujet.» L’idée du livre est née au quartier disciplinaire de Moulins, dans la cellule de Michel Vaujour, le braqueur aux cinq évasions. «On discutait, il m’a dit : "Monsieur Maurel, un jour il faudra qu’on écrive ce qu’on a vécu. Mais les gens n’y croiront pas."» Olivier Maurel ouvre les portes, cellule par cellule, et ce qu’il montre de l’intérieur est en effet édifiant.

Moulins, cellule d’un double perpète. «La veille, on se tapait un délire dans la salle informatique», se souvient le directeur. Le lendemain, le prisonnier l’agresse. «Le seul surveillant qui a pu s’approcher s’est fait sécher en moins de deux.» Quatre détenus se lancent vers l’agresseur : «Partez monsieur Maurel, on le maîtrise.»

Mirador n°1, prison de Bois-d’Arcy. Le surveillant ne répond plus. A l’intérieur, une odeur de métal rouillé, «du sang et de la matière cervicale». Le gardien s’est supprimé. Quand ils l’apprennent, des détenus applaudissent. «La première fois, ça secoue. Après, il y a toujours le choc et l’émotion. Mais les pieds dans le sang, vous faites mentalement une check-list des appels à passer… Les psys appellent ça l’habituation.»

Fleury-Mérogis, division 1, peu avant Noël. Rachid délire, Rachid veut extirper le démon de son propre corps. Malgré la ceinture de contention psychiatrique, il parvient à libérer son poignet, il se dévore l’index puis s’arrache un testicule. «La prison est devenue le déversoir des hôpitaux psychiatriques. On les appelle les "fatigués".»

Olivier Maurel a déplié la cartographie de la prison où l’on meurt violemment, celle des mutineries et des prises d’otages. Il y a l’autre, celle où l’on vieillit, celle de l’ennui. Il écrit : «Je dois alors "replier" le temps pour que les détenus ne perdent pas espoir.» Il explique: «Il faut remettre de la logique là où il n’en existe plus. On mobilise autour d’une formation, du maintien des liens familiaux, de petites choses essentielles.» A Poissy, Maurel a retrouvé un ancien de Moulins. «Vous n’avez pas la même voix», a dit le prisonnier. «J’ai pris de l’âge, traduit Maurel. J’ai été touché dans ma tête et dans mon corps depuis vingt ans.» Le détenu, lui aussi, avait vieilli. Ils se sont dit qu’ils avaient blanchi.





La médecine du travail s’invite dans la réforme des retraites


Les députés ont approuvé mercredi soir en commission un amendement du gouvernement sur la médecine du travail.

Ce texte prévoit que « les missions des services de santé au travail sont assurées par une équipe pluridisciplinaire ». Il stipule également que« l’employeur désigne un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise ».

Devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée, le gouvernement, représenté par le ministre du Travail Éric Woerth, a estimé qu’« il est important que les missions des services de santé au travail soient clairement définies par la loi » et souhaité « rétablir une égalité de traitement entre les différents salariés en uniformisant leur suivi médical sur le droit commun défini par décret ».

L’opposition de gauche a immédiatement dénoncé une opération de« démantèlement » de la médecine du travail et sa mise sous tutelle des employeurs.

L’examen de cet amendement en séance publique devrait avoir lieu vendredi ou lundi.

L’apparition au milieu de la nouvelle loi « retraite » du dossier de la médecine du travail, dont la réforme avait été lancée en 2008 par Xavier Bertrand sans jamais aboutir, n’est pas une surprise. Éric Woerth avait annoncé en mai dernier son intention de lier les deux chantiers.

› K. P.


Quotimed.com, le 09/09/2010








NANCY

LES CHIFFRES NOIRS DU SUICIDE DES JEUNES

600 à 800 jeunes de 15 à 24 ans meurent chaque année en France par suicide. Le Nancéien Jean-Pierre Kahn rappelle quelques chiffres
.

Nancy sera la tête de pont française de cette étude européenne. Pourquoi ce choix ?

Pr Jean-Pierre KAHN, chef du service psychiatrie au CHU de Nancy : « Ce n’est pas parce qu’on meurt plus du suicide en Lorraine. Il se trouve que j’appartiens à une association mondiale de psychiatrie, ainsi qu’à une association européenne, et qu’à ce titre, j’ai beaucoup de contacts avec la responsable de l’institut suédois qui a initié cette étude. En Suède et en Finlande, ils ont beaucoup d’avance sur nous en ce qui concerne la prévention et la recherche sur le suicide. »

Dispose-t-on de chiffres fiables sur le suicide ?

« En France, on estime qu’il y a annuellement 10 600 à 11 000 morts par suicide, ou considérées comme telles. Mais tous ces actes ne sont pas déclarés comme suicide. Il est généralement admis qu’il y a un taux de suicide déguisé, c’est le terme, de 20 %. Quelque un qui va percuter un arbre au volant de sa voiture en pleine ligne droite, ce n’est pas forcément qu’un accident. Mais 11 000 décès, cela fait 60 à 70 000 personnes endeuillées qui doivent surmonter la culpabilité, la honte, le remords qui s’ajoutent au chagrin, et qu’il faut aider. »

Et chez les jeunes ?

« Chez les 15-24 ans, le suicide reste la deuxième cause de décès après les accidents de la route. Avec la même réserve sur les vrais chiffres. 600 à 800 jeunes meurent par suicide chaque année en France. 5 à 8 % des ados de 15 à 24 ans font une tentative. C’est beaucoup. »
Propos recueillis par M. RAUX.

Publié le 09/09/2010






LA SANTÉ MENTALE DES ADOS SOUS LA LOUPE

Prévenir le suicide chez les jeunes et surtout dépister leur mal-être, tel est l’objectif d’une grande enquête européenne. Onze pays sont concernés, mille lycéens et lycéennes lorrains représentent la France.

Qui mieux que les ados pour parler de leur mal-être ou de leur bien-être ? «  Jusqu’à maintenant, ce sont toujours des adultes qui parlent de la santé mentale des jeunes », constate le professeur Jean-Pierre Kahn, chef du service de psychiatrie et de psychologie clinique au CHU de Nancy.

DOSSIER

« L ’objectif de la grande enquête européenne est de recueillir des informations scientifiquement validées sur l’état psychique et les valeurs des jeunes Européens. Actuellement, on ne sait pas grand-chose sur les valeurs partagées par ces ados ».

1 000 lycéennes et lycéens

Initiée en Suède, très en avance sur le sujet, l’enquête, baptisée SEYLE, concerne douze pays. Elle portera sur 11 000 lycéens de 14 à 16 ans. Elle aura pour but d’évaluer la condition psychique et physique des adolescents. Pour représenter la France, la Lorraine, sous l’égide du CHU de Nancy et de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), a été retenue. Mille élèves de classes de seconde de vingt lycées d’enseignement général lorrains seront sélectionnés dès cette rentrée pour intégrer l’enquête. «  Pour que cela soit significatif, l’objectif est d’arriver à une cohorte de mille élèves en fin d’enquête, ce qui veut dire qu’il en faudrait au départ un peu plus d’un millier », explique Alexandra Tubiana, chef du projet.

En partenariat avec le rectorat de l’académie de Nancy-Metz, les vingt lycées retenus sont chargés de diffuser l’information. A peine une semaine après la rentrée, près de 400 lycéens et lycéennes sont déjà volontaires, avec l’accord de leurs parents.

Questionnaire anonyme

«  Dans un premier temps, les jeunes sélectionnés répondront à un questionnaire contenant une grande variété de sujets, allant de leurs valeurs aux addictions », poursuit Alexandra Tubiana. Les questionnaires seront anonymes lors de leur traitement. Cependant, le service de psychiatrie connaîtra le nom du jeune qui aura répondu et pourra prendre contact avec lui si le contenu des réponses est inquiétant. Au total, les jeunes volontaires répondront à trois questionnaires.

Parallèlement, des équipes du projet interviendront dans les établissements concernés pour mener des actions d’information, de formation et de sensibilisation sur la prévention du suicide auprès des personnels et des ados volontaires. «  Actuellement, le suicide fait dans le monde un million de morts par an, soit un mort toutes les quarante secondes. Pour 2020, les prévisions de l’OMS sont d’un million et demi de suicides », souligne le professeur Kahn, pour bien montrer l’urgence à traiter le problème.

Ce dernier et ses équipes prennent dès aujourd’hui leur bâton de pèlerin pour sensibiliser les responsables des lycées et les jeunes concernés. En particulier, ils sont cette après-midi à l’amphi Demange, sur le campus de l’île du Saulcy, et le 13 septembre à Thionville.

M.-O.N.


SEYLE veut dire en français sauver et améliorer la vie des jeunes Européens.

Publié le 09/09/2010






30/08/2010

Plus on est de fous, mieux on vit


Selon des chercheurs américains, pour bien se porter mieux vaut avoir une vie sociale conséquente.

Par LISETTE GRIES

N’en déplaise aux misanthropes, les autres sont peut-être le meilleur moyen d’éviter une descente aux enfers précipitée. Des chercheurs américains ont compilé les résultats de 143 études sur les liens entre relations sociales et état de santé. Il en ressort que l’isolement augmente les risques de mortalité. Vivre reclus serait aussi dangereux que fumer quinze cigarettes par jour ou être alcoolique. Et deux fois plus risqué qu’être obèse.

Plusieurs raisons sont évoquées pour expliquer l’impact de la vie sociale sur la forme physique. Une personne malade mais bien entourée prendra les repas qu’on lui prépare, les médicaments qu’on lui laisse sur la table de nuit et aura moins de chances d’oublier ses rendez-vous médicaux. Mais être au cœur d’un réseau social conduirait également à se soucier davantage de sa propre santé. «Quand on se sent responsable d’autres gens, on se sent utile et l’on prend moins de risques», souligne Julianne Holt-Lunstad, une psychologue membre de l’équipe de chercheurs. Autrement dit, pour ne pas laisser tomber ses collègues ou son équipe de volley, on surveillerait de près alimentation, loisirs et mode de vie.

L’étude montre également que la présence d’une personne de confiance à nos côtés lors d’une situation stressante empêcherait que le rythme cardiaque et la pression artérielle ne s’emballent. En gros, plus on est de fous, moins on s’inquiète. Une hypothèse scientifique avance que les hormones du «stress» influencent le fonctionnement du système immunitaire. Une vie sociale variée et dense, en diminuant le stress, aurait alors un impact direct sur la bonne tenue des défenses naturelles.

Ce bénéfice pour la santé fait défaut, dans l’Hexagone, à près de 4 millions de personnes. Une étude de la Fondation de France, parue au début de l’été, montre qu’un Français sur dix souffre de grande solitude et qu’il est déconnecté des quatre sphères sociales : famille, amis, emploi et vie associative. Un individu sur quatre n’a de contact que dans l’une de ces sphères. Ces situations ne concernent pas que les personnes âgées : la moitié de ces «isolés» ont moins de 60 ans. Ce risque d’être seul, impossible à réguler médicalement, est de surcroît plus important pour les gens qui ont de faibles revenus.





Davantage de psychose en ville qu’aux champs

Les populations urbaines sont bien plus concernées par les psychoses que celles des campagnes. Une tentative d’explication est fournie par des médecins de Cardiff (Royaume-Uni). Stanley Zammit et coll. se sont penchés sur une vaste cohorte suédoise de 203 829 personnes. Ils disposaient notamment de leurs données individuelles, scolaires ainsi que d’informations municipales et régionales. De fait, le risque de psychose était plus urbain que rural.

Au total, l’étude a relevé 328 cas de schizophrénie (0,16 %), 741 cas d’autres psychoses non affectives (0,36 %), 355 de psychoses affectives (0,17 %) et 953 de diverses psychoses (0,47 %).

Les différences entre ville et champ s’expliqueraient pour les psychoses non affectives par une fragmentation sociale dès le niveau de l’école. Pour tout type de psychose, la fragmentation sociale participerait, mais s’y ajoutent l’ethnicité et les privations.

Le travail souligne qu’afin de maintenir sa santé mentale, un individu doit ressentir un certain degré de sécurité, de cohésion sociale et d’esprit de communauté.

› Dr G. B.


« Arch Gen Psychiatry » 2010; 67(9): 914-922.
Quotimed.com, le 08/09/2010

dimanche 12 septembre 2010





Appel à la grève dans les hôpitaux psychiatriques le 28 septembre

Les psychiatres hospitaliers sont appelés à une grève le mardi 28 septembre contre un projet du gouvernement visant à réformer l'hospitalisation sans consentement qui "compromet gravement les soins et les libertés publiques", selon une large intersyndicale du secteur.
L'appel a été lancé dimanche par l'intersyndicale des psychiatres du secteur public (IPP) fédérant le syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) et l'intersyndicale de défense de la psychiatrie publique (Idepp), soit 80% de la psychiatrie publique.

Le corbeau et le renard de La Fontaine revisités

Prenez un loup, un renard, un hibou et un divan de psychanalyse et vous obtiendrez l'une des bandes dessinées les plus déjantées du moment.

Sorti de l’imagination de Munuera, créateur de la série Merlin, le personnage de Walter le loup est de retour aux éditions Dargaud dans "Une faim de renard".

Version moderne de la fable de La Fontaine "Le corbeau et le renard", ce nouvel opus met en scène Walter le loup et Fairbanks le renard, deux prédateurs avides d’assouvir un des plus grands plaisirs de l’existence : passer à table ! Pour l’aider, Fairbanks peut compter sur les conseils de son psychanalyste, un hibou débonnaire.

Qui de Walter, qui joue ici le rôle du corbeau, ou de Fairbanks, le renard affamé, sortira vainqueur de cette lutte ? Les ruses, toutes plus absurdes les unes que les autres, les coups bas s’enchaînent dans un rythme effréné, un peu à l’image de ceux imaginés par Coyote, le célèbre héros de cartoons qui tente désespérément d’attraper Bip bip.
A partir de 8-10 ans

120 ans de psychiatrie

L'histoire du Centre hospitalier Charles Perrens à découvrir jusqu'au 30 septembre.

Dans le cadre de la célébration des 120 ans du centre hospitalier Charles Perrens, le 18 septembre, une exposition se tient jusqu'à la fin du mois, tous les après-midis, dans l'ancien self du personnel de l'hôpital. Elle sera inaugurée lundi à 18 heures. « On a loupé les 100 ans, on fête les 120 ans ! » plaisante Antoine de Riccardis, le directeur de l'hôpital, qui a confié le bébé à Francis Baudy et la mise en lumière et en sons du site à Eric Le Collen.

D'Asclepios à Charles Perrens

Historien du quartier, Francis Baudy est l'homme de toutes les situations. On lui doit des livres et plusieurs expositions fameuses sur et dans le quartier Saint-Augustin nord et sud et la première randonnée pédestre commentée du site hospitalo-universaire, l'an dernier, pour les Journées du patrimoine.

Cette fois, son travail sur la mémoire de l'hôpital pour l'expo « D'Asclepios à Charles Perrens » lui a pris des mois de recherche. Sa collection personnelle d'objets et de pièces rares - 1 500 clichés du quartier, notamment et de souvenirs : son frère était ambulancier à l'hôpital, sa grand-mère y travaillait -, n'ont pas suffi. Il a fallu la complicité des équipes de l'hôpital, de responsables d'institutions, de collectionneurs et de riverains comme Simone Berchon et l'aide précieuse du personnel des archives, Sophie Vauzelles et Fabienne Cantau, pour retrouver la vie quotidienne de ce qui fut autrefois « l'asile des aliénés de Château-Picon ».

Exclusivement féminin de 1845 à 1972, l'hôpital tenait le registre de ses pensionnaires : « marchande ambulante, fille soumise, cultivatrice, garde barrière, rentière, mercière, ouvrière… » Véritable petite ville autonome, « des familles entières du quartier, pendant des générations, ont travaillé là », dit Francis, l'établissement avait et a toujours sa chapelle, ses dortoirs, ses cuisines, ses bains, ses lieux de soins, sa lingerie, sa crèche et son jardin. Avec autrefois les légumes, des poules, des vaches et des cochons.

« On a trouvé des merveilles ! » : les vieux dossiers du médecin chef de l'époque, les rapports médicaux du Dr Pons, une photo inédite de Jean-Jacques Valleteau, l'architecte qui a construit l'hôpital et que l'on voit devant son domicile bordelais. On a des images des « sœurs reposantes », les religieuses de Nevers qui ont toujours dirigé l'asile, jusqu'en 1963. Et celles de pensionnaires qui brodaient, aidaient à la cuisine, à la laverie, au potager, pour payer leur prix de journée. 70 photographies, des registres aux belles écritures pourpres et des objets de l'époque ou de soins, souvent effrayants, donnent l'ambiance : moules à suppositoires, clystères monstrueux utilisés pour les lavements, piluliers pour fabriquer les cachets, mortiers en porcelaine, vieux flacons à sirop ou carnet à souche pour les stupéfiants.

Aujourd'hui, un lieu ouvert
Mixte en 1972, château Pichon est devenu le Centre hospitalier Charles Perrens deux ans plus tard, du nom d'un de ses médecins chefs (1920 à 1952) et professeurs à la faculté de médecine. « La psychiatrie a beaucoup évolué au cours des ces trente dernières années, les portes sont ouvertes, on peut traverser l'enceinte sans problème, mais ça ne se sait pas. Je pense que des gens vont venir voir comme s'ils venaient visiter la prison de Gradignan », dit Francis Baudy qui se souvient de Casimir, le concierge d'autrefois, le maître des clés. C'est lui qui ouvrait la porte de l'établissement et filtrait le personnel qui entrait.

Les frères William et Henry James aux Éditions Hermann



A première vue, le destin entremêlé de ces deux frères pourrait à lui seul refléter la relation  alambiquée entre philosophie, psychologie et psychanalyse. Vivement conseillée, la lecture simultanée du « William James » de Michel Meulders et de « L’aventure négative » d’André Green,  deux ouvrages publiés aux Editions Hermann, écarte une telle approche. Lire la suite..












La Dépêche du Midi

Lannemezan. Le personnel de l'hôpital manifeste à Tarbes
PUBLIÉ LE 11/09/2010 par HÉLÈNE DUBARRY.

Les personnels des centres hospitaliers sont allés manifester hier, devant le conseil général, pour protester contre les nouvelles organisations du travail.

Blouses blanches et tee-shirts imprimés « Sauvons la psychiatrie, la médecine, la chirurgie » avaient envahi les marches du conseil général, hier matin. A l'appel de la CGT, les personnels soignants voulaient être entendus des élus et exprimer leur colère et leur désaccord sur les nouvelles organisations du travail dans les unités.

À 11 heures, le rassemblement s'est formé devant l'hôtel du département et une délégation a été reçue par la présidente Josette Durrieu à midi.

« Nous sommes venus ici pour interpeller les élus, expliquait Jean-Francis Dupuy, responsable CGT des hôpitaux de Lannemezan. Nous savons que la présidente a un œil attentif sur les hôpitaux, nous espérons qu'aujourd'hui elle aura une écoute attentive. »

Le but de cette manifestation au cœur de Tarbes ? : la nouvelle organisation du travail.

Conséquences graves

« Depuis le 1er août dernier, le directeur a modifié de façon unilatérale les organisations de travail des services de psychiatrie et du foyer d'accueil médicalisé et ce, de façon effective. À partir du 1er octobre, il va modifier les organisations de travail à l'unité long séjour, ainsi qu'en médecine et en chirurgie. Cette nouvelle organisation réduit de façon conséquente la présence des soignants auprès des patients. Avant, les équipes se chevauchaient, avec des horaires décalés, ce qui permettait, et c'est essentiel, de faire le point : le temps de transmission et de relève n'existe quasiment plus, ce qui va entraîner des conséquences graves : des erreurs, des oublis. En enlevant du temps de présence, on enlève de la présence auprès des patients. Or, nous avons besoin de temps minimum pour répondre à la souffrance de ces patients. »




HÉNIN ET ALENTOURS

Les riverains du centre hospitalier découvrent le nouveau projet de psychiatrie

samedi 11.09.2010

Le centre hospitalier s'apprête à démolir l'ancien bâtiment consacré à la psychiatrie, afin d'y reconstruire un nouveau projet. Un projet présenté jeudi soir aux habitants des deux rues adjacentes.

PAR ÉLODIE LÉCADIEU

Directeur, médecins, architecte, chef de projet, ils s'étaient tous réunis devant les habitants de la rue des Glycines et de la rue des Aubépines, qui avaient répondu présents à l'invitation. Le but ? Les informer sur les travaux qui vont commencer. Le centre hospitalier compte en effet raser l'ancienne structure de psychiatrie pour en reconstruire une, sur ce même terrain. Une quarantaine de riverains s'étaient donc déplacés pour écouter attentivement les explications architecturales et médicales des porteurs du projet. Dans une ambiance plutôt calme au début, mais des voix se sont progressivement élevées. Francis Mazingue, résidant rue des Glycines depuis 1971, ne s'est pas fait prier. « On nous met devant le fait accompli. C'est un beau projet, c'est évident, mais nous n'avons pas été invités dans la discussion. On se demande ce qu'on vient faire ici. » Marguerite Pruvost, habitant la même rue, précise : « mon mur du fond est assez haut, mais une fois les fenêtres ouvertes, on entend des cris, des insultes ».

Sentiment d'insécurité

Puis vient une autre source de mécontentement de la part des riverains. « On entend des cris », « je suis en location mais je n'ose pas acheter car mon jardin borde le parc de l'hôpital », « il y a de grandes baies vitrées prévues sur le nouveau bâtiment qui va surplomber nos maisons, on perd notre intimité ». Mais la véritable inquiétude des voisins semble rester la présence de patients de l'hôpital psychiatrique à proximité de leurs habitations, les mots « insécurité » et « nuisances » revenant régulièrement au cours du dialogue. Et ce ne sont pas les nuisances dues au futur chantier qui inquiètent. Pour l'équipe hospitalière, la présence de ce nouveau bâtiment devrait, au contraire, être un gage de sécurité, puisque des équipes seront désormais présentes constamment dans cette partie du parc, d'autant que le nombre de patients admissibles va diminuer d'une centaine à environ 70. Après avoir porté ce projet pendant plus de deux ans, Bruno Avril, ingénieur en chef, estime que cette « expression de mécontentement est légitime et nécessaire. Il faut faire en sorte que le centre hospitalier soit bien intégré, mais il faut aussi que les gens comprennent qu'il ne s'agit pas d'une prison, mais d'un service de psychiatrie. » Certains riverains, en apprenant l'existence d'autres projets, tels qu'un centre médico-psychologique pour enfants ou une maison pour adolescents, prévus à proximité de la polyclinique d'Hénin-Beaumont, estimaient que le centre de psychiatrie auraient pu être implantés là-bas, et les structures pour enfants de leur côté. « Je suis choquée par certaines réactions, avoue Christine Pointet. chargée de communication et ancienne infirmière en psychiatrie.

J'ai habité pendant des années, avec mes jeunes enfants, un logement de fonction au sein du parc. Ma fille passait toute seule devant l'unité psychiatrique, et il n'y a jamais eu de problème. ».



Les trois maladies de l'hôpital public

09.09.10

Les Diafoirus qui s'agitent au chevet de l'hôpital public ont inventé des cautères qui s'appellent nouvelle gouvernance, tarification à l'activité, pôles, contrats d'objectifs et de moyens... Pourtant, point de bon remède sans un diagnostic de la maladie causale ; nous en avons identifié trois.

La première est bien paradoxale : c'est le progrès technologique. Les nouvelles techniques d'imagerie, les tests biologiques utilisés sans réflexion clinique préalable génèrent des milliers de "faux positifs". Nous passons notre temps à explorer de fausses anomalies, à demander d'autres examens coûteux et d'accès difficile (ce qui rallonge la durée d'hospitalisation) pour finalement ne découvrir que ce que nous avons baptisé "incidentalome" : une simple variation de la normalité - liée à l'excellente sensibilité - et la faible spécificité des tests diagnostiques modernes, variation qui ne correspond donc à aucune pathologie.

Ainsi, dans certains centres, plus de 30 % des examens d'imagerie concluent par "à confirmer par un autre examen d'imagerie" ; 40 % des femmes suivant scrupuleusement les recommandations pour le dépistage du cancer du sein auront au moins une fois dans leur vie une mammographie suspecte de cancer, mais faussement positive. Les chirurgiens, les radiologues interventionnels aiment les nouveaux appareils plus rapides, plus précis, plus faciles d'usage, mais chacun coûte quelques millions d'euros, et beaucoup n'ont jamais été évalués en termes de service médical rendu pour le patient.

Les jeunes générations de médecins, celles de l'image et des nouvelles technologies, croient aveuglément aux chiffres et aux écrans. Nous devons les éduquer à ne prescrire que les examens adaptés à la situation clinique du malade et à avoir une analyse critique des résultats.

La deuxième maladie est structurelle : c'est le protectionnisme corporatiste. Trop de conseillers, d'hommes politiques, de directeurs, d'élus, de mandarins, pensent à leur intérêt personnel plutôt qu'aux besoins de santé publique. Le maintien de trop petites structures, les moyens anormaux alloués à certaines maladies médiatisées ou à forte symbolique, l'hyperspécialisation, l'opposition systématique à chaque projet de regroupement, ainsi que la médiocrité de ces projets, l'impossibilité de faire évoluer certaines structures non plus vers ce qu'on a envie de faire mais vers ce dont la population à besoin sont autant d'obstacles à un hôpital efficace et répondant à ses missions sanitaires.

La troisième maladie est organisationnelle : c'est la gestion du temps de travail. Il est devenu impossible de faire cohabiter des médecins qui ont une mission de soins et ne quitteront l'hôpital que lorsque celle-là sera accomplie avec des médecins qui viennent assurer un certain temps de travail, de garde, de vacation sur un travail posté et qui refusent d'adapter leur temps hospitalier aux besoins, forcément fluctuants, des malades.

Les sirènes du privé, une perte de vocation, un salaire peu incitatif mais aussi une légitime demande de modalités d'exercice décentes rendent certaines spécialités médicales hospitalières sinistrées et retentissent également sur la qualité des soins donnés aux malades et sur les conditions de travail des autres spécialités.

Cette troisième maladie associée à la première et à la déviance sécuritaire du dramatique "principe de précaution" qui incite à demander sans réserve trop d'examens, trop d'avis pour trop de malades, a des conséquences dramatiques pour l'hôpital en termes financiers et en termes de rallongement de la durée d'hospitalisation.

Finalement, les remèdes pourraient être simples : imposer aux nouvelles technologies une véritable évaluation clinique de l'intérêt supplémentaire apporté dans la prise en charge des malades et former les médecins, mais aussi les malades, à leur usage raisonné comme à l'analyse critique de leurs résultats ; réussir à faire comprendre qu'il faut aimer ce que l'on fait et non faire ce que l'on aime en acceptant les restructurations légitimes (sur ce point le rôle des agences régionales de santé est capital : succès assuré si les réformes sont médicalement raisonnées, conflit garanti si les décisions sont purement comptables).

Enfin, il faut revenir à une vision moins égoïste de son métier pour redonner sa richesse et sa reconnaissance à la fonction de médecin hospitalier.




3ÈME CONGRÈS TRAVAIL SOCIAL ET PSYCHANALYSE
Montpellier du 04/10/2010 au 06/10/2010

Travail social : actes de résistance ?


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La résistance a mauvaise presse. Que ce soit chez les psy : résistance inconsciente du patient ou de l’analyste. Ou chez les managers : résistance au changement. Il est vrai qu’à résister «contre», et parfois tout contre, on s’y épuise en vaines plaintes et revendications. Mais il existe une autre face de la résistance, une face «pour», que l’engagement de nos aînés nous laisse en legs : la Résistance et ses réseaux firent pièce à l’oppresseur. La résistance, pour ne pas sombrer dans l’opposition stérile, ne nécessite-elle pas un pas de côté? D’abord prendre un peu de recul pour analyser la situation. Ce qui se met en scène dans le travail social n’est-il pas intimement lié au système néolibéral? Il s’agit alors d’en produire l’analyse, les constats ne suffisent pas. Seule l’évaluation de la situation et des forces en présence permet d’envisager un combat de tous les instants. Résister au laminage de la langue de bois qui pétrifie les paroles et les écrits des travailleurs sociaux ; résister au management industriel débridé qui écrase les dispositifs institutionnels; résister aux procédures de formatage, démarche-qualité, référentiels, domaines de compétence et autres avatars du psycho-socio-bio pouvoir qui tel un rouleau-compresseur écrase sur son passage les capacités d’invention des acteurs sociaux comme des usagers etc autant d’expressions de la résistance qui se déploient dans le travail social dans ces trois dimensions ouvertes lors du 2e Congrès, sous l’éclairage de la psychanalyse : clinique, institutionnelle, politique.

Ne s’agit-il pas pour les professionnels de s’exprimer pour que ces métiers de l’ombre, ces métiers de «trouvailleurs soucieux» de l'humain, prennent toute leur place? Cette «fraternité discrète» auprès des plus démunis de nos contemporains n’a-t-elle pas force de résistance face à «la plus formidable galère sociale» (J. Lacan) ? Les travailleurs sociaux réclament à corps et à cris une reconnaissance publique de leur travail. Le plus simple n’est-il pas de donner à lire, à voir, de faire savoir ce qu’il en est de ces métiers de l’intervention sociale, véritables «môles de résistance» en acte (M. Chauvière) ? Alors que tout dans notre société néolibérale tend à réduire la valeur à la seule valeur marchande, les travailleurs sociaux ne sont-ils pas aux avant-postes d’un combat pour l’humain? Les décideurs, financeurs, responsables politiques veulent savoir légitimement ce que font les travailleurs sociaux, quel usage ils font des deniers publics. Nous donnerons lors de ce congrès, une réponse, en acte… de résistance. Soutenus par des philosophes, des sociologues, des ethnologues, des psychanalystes, des praticiens de terrain, c’est à un véritable état des lieux des idées, des actions et des trouvailles de chacun, que nous nous attacherons.




Séminaire « Philosophie et psychanalyse »,
programme 2010-11.

Le séminaire philosophie et psychanalyse vise à remettre en route le travail de la pensée autour des questions issues de la découverte freudienne.Cette année, le premier semestre sera consacré au rapport entre marxisme, théorie critique, et psychanalyse (mais pas exclusivement) et, le second, au rapport entre phénoménologie et psychanalyse, avec d’importantes excursions du côté de Hegel, des mathématiques et de la déconstruction.

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Dorian Gray ou le mythe de Narcisse ?


Le portrait de Dorian Gray” est un roman d’Oscar Wilde publié en 1890.

Dorian Gray est un jeune britannique d’une grande beauté et semble conscient de son pouvoir de séduction. Un ami peintre, Basil Hallward, obsédé par Dorian, souhaite immortaliser son visage en effectuant son portrait. Après avoir fini la toile, Basil déclare que ce tableau est l’oeuvre de sa vie.

Basile présente à Dorian le lord Harry. Cet homme aura une grande influence sur le jeune homme : il lui fera découvrir une vision de la vie orientée principalement sur le plaisir ( la fameuse citation: “la meilleur façon de résister à la tentation, c’est d’y céder”).

Dès lors, Dorian sera obnubilé par son apparence à tel point qu’il deviendra jaloux du tableau effectué par son ami Basile. Il en vient à souhaiter que son portrait vieillisse à sa place pour qu’il puisse garder son visage d’adolescent tout sa vie.

Il tombe amoureux d’une jeune comédienne, Sybil Vane, à qui il promet le mariage mais revient sur sa décision, et la quitte. Il apprendra que Sybil s’est suicidée à la suite de cette rupture. A partir de cet instant, le tableau commence à changer, et le portrait prend certains traits qui n’existaient pas auparavant. Il décide donc d’enfermer son tableau dans une  salle.

Les années passent, le tableau paye les frais de la dépravation de la vie de Dorian. Il vieillit est porte les marques des maladies que Dorian devrait avoir. Il en vient à tuer son ami Basile à qui il a dévoilé la vérité.

Souhaitant que le tableau retrouve sa beauté d’antan, il décide de redevenir sage et reprend une vie saine. Malheureusement, le portrait devient de plus en plus hideux. D’un geste désespéré, Dorian attrape le couteau utilisé pour tuer Basile, et le plante dans le tableau. On retrouvera un vieil homme mort au pied d’un portrait qui a retrouvé son aspect originel.

Freud introduit le concept de narcissisme secondaire en évoquant une période où l’enfant s’investirait comme propre objet d’amour se faisant au détriment de l’investissement libidinal de l’objet. La personnalité narcissique se fonde sur un besoin d’admiration, et se caractérise par un manque d’empathie. Dorian a pour seul objet d’amour soi-même, a tel point qu’en regardant le tableau fait de lui (comme Narcisse regardant son reflet dans l’eau), il tombe amoureux de lui-même et veut absolument rester ce qu’il perçoit dans le tableau.

Au-delà de ce narcissisme, il y a également une peur de mourir, refusant l’éventualité de vieillir. Dorian souhaite rester jeune. Ce roman évoque ainsi plusieurs éléments des problématiques adolescentes.

Oscar Wilde écrit ce roman avant le scandale “Queensberry”. Après s’être marié en 1884, Oscar Wilde, a des aventures homosexuelles en 1886 et en 1891. Il affiche ces relations publiquement (l’homosexualité est interdite aux Royaumes-Unis à cette époque) et est condamné  à 2 ans de prison en 1895.

Dorian Gray a des relations hétérosexuelles et homosexuelles dans le livre. Et après avoir été amoureux d’une femme qu’il rejette ensuite, il a des conquêtes masculines (comme Basile Hallward, le peintre).

Dorian Gray, serait-il, ainsi, une autobiographie romancée de la vie d’Oscar Wilde?