vendredi 3 février 2012


Parlons sans peur de la psychiatrie

Par ANTOINE PELISSOLO Professeur de psychiatrie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, université Pierre-et-Marie-Curie
Deux problèmes de santé publique, qui font l’actualité, interpellent fortement la psychiatrie : l’autisme et l’alcoolisme. Souvent, dans les deux cas, le même rejet de la part des patients, des familles, voire des politiques : il ne s’agirait pas de maladies psychiatriques et les psychiatres ne seraient donc pas les bons professionnels.
Les diverses mesures ministérielles annoncées sur l’autisme (grande cause nationale 2012), essentielles pour rattraper le retard français, sont ostensiblement tournées vers l’aide aux structures médico-sociales (lieux de vie, programmes éducatifs…), légitimement, mais délaissent l’hôpital et la psychiatrie. Certes, les familles ont de bonnes raisons de remettre en cause certaines pratiques psychiatriques françaises.
La priorité longtemps donnée aux approches psychanalytiques dans l’autisme s’est traduite par une mise en cause des parents, qui se sont sentis accusés d’avoir une responsabilité dans l’apparition de la maladie de leurs enfants. En parallèle, les méthodes de soin et d’apprentissage, issues des théories comportementales et reconnues dans d’autres pays, n’ont pas pu se développer avant l’impulsion venue des associations de familles depuis dix ans. Malgré ces réalités indiscutables, un excès inverse de «dépsychiatrisation» totale de l’autisme, ne mettant l’accent que sur les aspects éducatifs, serait une grave erreur.
L’autisme est un handicap, c’est vrai, mais c’est aussi une maladie. Une maladie psychiatrique n’est pas forcément un dérèglement psychologique provoqué par le stress ou une influence familiale délétère. Les connaissances actuelles sur, par exemple, la schizophrénie ou les troubles obsessionnels compulsifs en font des pathologies très probablement liées à des dysfonctionnements cérébraux et, en partie au moins, sous-tendues par des facteurs constitutionnels et génétiques. Il n’est pourtant pas question de sortir ces affections du domaine de la psychiatrie car, seule une approche globale de la personne, à la fois biologique et psychologique, peut conduire à une compréhension de ces troubles et de leurs traitements.
Le même raisonnement s’applique à l’autisme, pour lequel aucun spécialiste n’est mieux placé que le psychiatre pour analyser les différents handicaps qui le composent : difficultés à comprendre l’autre, à décrypter les émotions, à se construire une représentation de soi-même, etc. C’est le cas dans le monde entier, et même en France, où des recherches de haut niveau sont menées par des équipes de psychiatrie et de pédopsychiatrie, en collaboration avec des chercheurs en neurosciences, sur les bases cérébrales et génétiques de l’autisme. Psychiatrie n’est synonyme ni d’asile ni de psychanalyse et les médecins formés à cette spécialité inventent et utilisent, en collaboration avec des psychologues, les thérapies comportementales et cognitives efficaces dans de nombreuses pathologies. Ils peuvent et doivent continuer à chercher des traitements médicamenteux et psychologiques à l’autisme.
A propos de l’alcoolisme, les lecteurs de Libération (17 janvier) ont pu lire que le cardiologue Olivier Ameisen considère que cette maladie doit sortir du«champ de la psychiatrie et de la honte». Comme les autres addictions, l’alcoolo-dépendance est une affection terrible qui génère de nombreux problèmes médicaux, mais dont le centre reste un trouble du contrôle des pulsions et des émotions, et donc bien une pathologie relevant de la psychiatrie. Le docteur Ameisen consacre tout son temps et son énergie à la défense (louable) d’un nouveau traitement potentiel, le baclofène, qui lui a permis de guérir lui-même de la dépendance à l’alcool. Très clairement, pour lui ou la journaliste qui a retranscrit ses propos, psychiatrie égale honte et folie. Et les bons traitements doivent venir d’ailleurs, de médicaments et de médecins soignant probablement de «vraies» maladies, comme nous l’entendons souvent dans la bouche de nos confrères non psychiatres. Ces prises de position sont méprisantes pour notre spécialité et notre travail, mais ça n’est pas le plus grave. Les principales victimes sont les malades eux-mêmes : ceux qui sont effectivement suivis en psychiatrie et qui n’ont vraiment pas besoin de cette stigmatisation supplémentaire, et ceux qui devraient l’être du fait de leurs troubles, mais qui y renoncent par peur de ce marquage social rédhibitoire.
Car la psychiatrie est avant tout une spécialité médicale, avec ses diagnostics, ses examens, ses traitements. Son domaine particulier est ce qui fait la dignité humaine : l’harmonie entre l’esprit, les sentiments et les comportements. Exercer en psychiatrie, qu’on soit médecin ou infirmier, c’est prendre soin de l’autre en l’aidant à se sentir plus en accord avec lui-même, à retrouver sa liberté de penser et d’agir, à reconstruire des liens solides avec ses semblables.
Même si beaucoup de progrès restent à faire, de très bons résultats sont accessibles dans nombre de maladies. Ce sera le cas à terme pour l’autisme ou la dépendance alcoolique. Mais à la seule condition que l’on mette de côté les combats stériles, que l’on respecte les malades quels qu’ils soient, «psychiatriques» ou non, et qu’on lutte contre les seuls poisons véritables : les maladies et les préjugés.


Management éthique de la GRHUne théorie consensuelle mise à mal sur le terrain

01.02.12 - 18:06 - HOSPIMEDIA 
La GRH est aujourd'hui confrontée à de multiples contraintes qui ouvrent une brèche au développement d'une approche productiviste utilitaire. Une réflexion éthique permet de revenir à l'essence même de ses pratiques.
Dans le cadre d'une journée d'étude sur le thème "Éthique et GRH" organisée à Paris le 27 janvier, l'Association pour le développement des ressources humaines des établissements sanitaires et sociaux (ADRHESS) a souhaité mettre en avant les valeurs de respect, d'équité et de solidarité qui la guident et qui fondent le service public hospitalier. Jean-Marie Barbot, président de l'association, a dès lors indiqué être "vigilant", craignant le développement d'une "approche productiviste utilitaire" de la Gestion des ressources humaines (GRH) dans le contexte actuel de résorption des déficits hospitaliers. Il préfèrerait en effet que se diffuse une GRH solidaire entre établissements avec la définition de bonnes pratiques professionnelles.
Crainte d'une approche productiviste utilitaire
Dans l'assemblée, tout le monde a évidemment adhéré au discours théorique d'un management des hommes suivant des valeurs (humaines, sociales, d'écoute, de bientraitance...), évoqué par Florence Gruat, cadre supérieure de santé, adjointe à la coordination des soins au CHS Théophile Roussel à Montesson. Pourtant sur le terrain, ce n'est pas une évidence. Dans le contexte de pénurie de certaines compétences et surtout de maîtrise des dépenses, les participants ont par exemple évoqué des coups bas entre établissements voisins pour l'acquisition d'une compétence rare.
Adapter la hiérarchie et les outils
Laëtitia Laude-Alis, enseignante à l'École des hautes études en santé publique (EHESP) a quant à elle cité la référence constante à la hiérarchie en France. Or, dans l'Hexagone, ce soutien hiérarchique (émotionnel, technique et fonctionnel) n'est pas suffisamment satisfait, a-t-elle rappelé, s'appuyant sur les données bibliographiques disponibles. Seuls 36% des salariés du secteur public estiment en effet disposer du soutien de leur hiérarchie, contre 59% en moyenne dans les autres pays de l'Union européenne. Alors quand on parle d'intégration dans la fonction publique hospitalière, de pratiques et d'outils bottom-up (management participatif par objectif, évaluation 360°...), Laëtitia Laude-Alis met le holà. Selon elle, "toutes les organisations ne sont pas prêtes à ces outils". Et de se déclarer "méfiante sur une vision universaliste et non contextualisée" de la GRH. Par contre, tempère l'enseignante, il est possible d'adapter l'outil au terrain et notamment au contexte local et culturel. Elle a aussitôt été confortée dans ses propos par Dominique Cigan, directeur des ressources humaines de l'EPS Maison Blanche à Paris, qui n'est "pas toujours convaincu par le management participatif" mais plutôt par "le contributif".
Christian Poimboeuf, DRH à l'AP-HP, estime quant à lui que "l'éthique a une grosse responsabilité par rapport à l'animation de l'équipe". Selon lui, il faut provoquer le débat pour ne pas s'enfermer dans l'activité quotidienne, prendre le temps de discuter, d'écouter... bref de reposer des bases simples sur la fonction. C'est dans cet état d'esprit par exemple, que Michel Dogué, directeur du CHS Théophile Roussel à Montesson, vice-président de l'ADRHESS, construit actuellement au sein-même de son projet d'établissement "un projet managérial avec une charte managériale".
P.H.
Enquête sur les valeurs dans la fonction publique
Le Réseau des écoles de santé publique (RESP) mène actuellement une enquête sur les valeurs dans la fonction publique : valeurs de référence, valeurs en acte, valeurs des parties prenantes. Certaines ressortent "fragilisées", a indiqué Laëtitia Laude-Alis. Ainsi, précise-t-elle, les valeurs les moins représentatives dans la fonction publique hospitalière sont : l'exemplarité (51%), l'efficience (49%) et la loyauté (48%).
5 000 questionnaires ont été réceptionnés sur la partie quantitative de cette enquête, la partie qualitative restant quant à elle à finaliser.
P.H.

Fin du mouvement de grève aux hôpitaux de Saint-Maurice (Val-de-Marne)

01.02.12 - 17:55 - HOSPIMEDIA 
Après plusieurs jours de grève illimitée (7 jours et 3 semaines de mobilisation) aux hôpitaux de Saint-Maurice (Val-de-Marne), les syndicats CGT et Sud Santé annoncent dans un communiqué avoir finalement trouvé un compromis avec la direction et donc voté l'arrêt du mouvement de contestation en assemblée générale mardi. La direction s'est engagée "à verser un reliquat de prime de 150 euros (...) à tous les agents bénéficiant de la prime avec le salaire de février 2012", indiquent les deux syndicats. L'information a été confirmée à Hospimedia par une source proche de la direction. L'objet principal du désaccord portait effectivement sur le versement d’une partie de la prime de fin d’année au mérite. Cela aurait donc consisté à attribuer cette prime qu’à une partie du personnel pénalisant par exemple ceux qui ont pris des congés maladie, rapportent les deux syndicats. 
L.W.

Élections 2012L'appel au futur président des signataires du "Manifeste pour une santé égalitaire et solidaire"

01.02.12 - 17:23 - HOSPIMEDIA 
Dans une lettre ouverte intitulée "Santé publique : les dix mesures que nous attendons du prochain président" et diffusée ce 1er février sur le site d'information Rue89, des signataires* du "Manifeste pour une santé égalitaire et solidaire" – édité en septembre dernier chez Odile Jacob (lire la 4e de couverture sur le site de l'éditeur) – listent dix de leurs attentes en écho, également, à un courrier aux candidats à la présidence de la République déjà diffusé mi-décembre :
-Abroger le volet hospitalier de la loi HPST,
-Mettre fin à la convergence tarifaire déloyale entre le public et le privé,
-Moderniser/restructurer les hôpitaux sur des critères médicaux et non comptables à courte vue,
-Décréter un moratoire sur les fermetures de lits et arrêter les suppressions d'emplois de personnels hospitaliers,
-Réaffirmer que l'hôpital n'est pas une entreprise et en tirer les conséquences,
-Recentrer l'hôpital sur le patient non en parole mais dans les faits,
-Refonder les CHU en maintenant l'esprit d'intégration qui a présidé à leur création contrairement au processus de fragmentation en cours,
-Revoir les modalités des activités médicales privées à l'hôpital public,
-Améliorer les rapports entre la médecine de ville et la médecine hospitalière,
-Promouvoir la démocratie sanitaire.
T.Q.
* Entre autres le Pr André Grimaldi, chef du service de diabétologie à l'hôpital de la Pitié-Salpétrière à l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), le Dr Alex Pariente, hépato-gastroentérologue au CH de Pau et Frédéric Pierrusociologue et chargé de recherche au CNRS Paris-Dauphine.

Ensemble, patients et soignants pour un défilé de mode pas comme les autres

vendredi 03.02.2012, 05:33La Voix du Nord
 Pour le collectif «J'm'défile», c''est une façon de lutter contre les stigmatisations...Pour le collectif «J'm'défile», c''est une façon de lutter contre les stigmatisations...
Les Plus du bénévolat récompensent chaque année, depuis vingt et un ans, celles et ceux qui s'investissent sur le territoire. Dans la catégorie « Mieux vivre ensemble », le jury a choisi le collectif « J'm'défile », qui a organisé en octobre dernier un défilé de mode avec des patients des unités tourquennoises de psychiatrie (UTP). Rencontre avec les acteurs de ce projet inédit.
PAR MARLÈNE VITEL
tourcoing@lavoixdunord.fr PHOTO LA VOIX >
Un défilé comme les pros Le 10 octobre dernier, la Maison des associations de Tourcoing accueillait dans ses locaux un défilé pas comme les autres. Sur le podium, des patients et du personnel soignant des unités tourquennoises de psychiatrie. Les mannequins d'un soir avaient préparé la chorégraphie avec Julie Vandewaele, éducatrice en sport adapté. Quant aux vêtements, ils avaient été prêtés par les élèves d'ESMOD Roubaix et un magasin tourquennois. Enfin, le lycée professionnel de Loos s'est occupé de la coiffure et du maquillage. « Le résultat fut bluffant. Malgré le trac, il n'y a pas eu un seul couac pendant une heure de défilé », précise Catherine Thévenon, psychiatre.
Changer le regard, bousculer les mentalités Sur scène, impossible de deviner qui était patient ou soignant. « C'est une façon de lutter contre les stigmatisations. Le public a été impressionné, beaucoup se sont dits qu'eux-mêmes n'auraient pas osé », affirme la psyhiatre. « Cela a permis un travail sur l'image de soi. Certains ont donc changé leurs regards... C'était la rencontre de deux mondes », poursuit Christophe Polito, de la fédération départementale de sport adapté. « Les patients ont affronté leurs peurs, montré leurs capacités. Il faut faire évoluer les mentalités, agir ensemble pour mieux vivre ensemble », conclut Alain Mezrag, adjoint au maire.
L'utilisation du sport et de la culture pour la santé mentaleRégulièrement, les patients des UTP participent à des ateliers d'insertion, souvent axés sur la culture. Malheureusement, les projets autour du sport restent rares. « Nous avons beaucoup de retard sur les pays anglo-saxons dans ce domaine. Le sport est sous-utilisé dans le traitement de la santé mentale », regrette Catherine Thévenon. « C'est difficile de trouver des activités qui se prêtent à ce genre de public. Le défilé correspondait parfaitement », précise Christophe Polito.
Un prochain défilé ?
« Cet atelier de chorégraphuie est une activité habituelle au sein de l'unité », précise Catherine Thévenon. De quoi lancer un nouveau défilé ? « Même si l'activité a été anxiogène pour les patients, on en a tous gardé un excellet souvenir. Il y aura donc un nouveau défilé, le 16 mars. Cette fois, des vêtements ethniques seront présentés. » •

Le collectif "Soutenons le mur", ou l'art d'avoir toujours raison

La culpabilité qui porte sur les parents d’enfants autistes est une culpabilité qui vient d’abord  de l’idée psychologique que ce qui arrive à l’enfant vient des parents. Je n’en crois rien.”
Stevens Alexandre, Aux limites du lien social, les autismes” Les Feuillets du Courtil, 29, janvier 2008, psychanalysteridiculisé dans le film « le mur » et dont les propos ont été déformés intentionnellement.
La croisade du collectif « soutenons le mur » et ses enjeux
Le contexte de la polémique autour du film « Le mur » et son procès, étant connu, je ne m’y attarderai pas. J’ai choisi de m’intéresser au discours militant des partisans du film « Le mur » et consorts. Ce discours vise à convaincre l’opinion publique que la psychanalyse est une fausse science, dangereuse de surcroît, et ce à grands renforts de billets, commentaires et tweets vibrionnants sur le Net. Parmi la masse invasive des énoncés vengeurs, on peine à trouver en provenance de ce mouvement un article véritablement étayé sur la question, -mis à part celui de Brigitte Axelrad, « À propos du film « Le Mur ou la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme »,  lequel tranche sur l’indigence des réponses inondant la toile de leurs approximations  et de leurs anathèmes. Disons que c’est une bonne synthèse de tout ce qui se dit aujourd’hui sur la question, mais du point de vue exclusif des neurosciences.
Bien plus, à y regarder de près et à lire entre les lignes, on se rend compte que ce n’est pas seulement la psychanalyse qui est attaquée mais aussi la pédopsychiatrie, lesquelles disciplines sont d’ailleurs à dessein confondues. Pourquoi se fatiguer à discriminer finement les approches, alors que cela amoindrirait la portée des slogans du collectif « soutenons le mur »? La caricature et la simplification sont bien plus persuasives.
Beaucoup d’éléments parmi les messages soutenant le film « Le mur » sont tirés directement de la source B.Axelrad (en provenance d’un site zététique), laquelle a fourni en outre le plan version light de certaines interventions. A lire tous les énoncés anti-psychanalyse (la psychanalyse devenant une catégorie fourre-tout),  on n’entend plus que les répétitions d’un même message (syndrome du perroquet). 
Brigitte Axelrad, assurée de sa formation en psychosociologie, remet en question le travail et les recherches des pédo-psychiatres français dans le domaine complexe de l’autisme, et valorise à l’inverse les thèses des neuroscientistes et des psychologues TCC, selon le principe « deux poids, deux mesures ».
A croire que n’importe qui peut aujourd’hui peut se croire dispensé de faire médecine, puis une spécialisation en psychiatrie, pour affirmer connaître le domaine complexe du spectre autistique et faire valoir son avis sur la question par rapport à celui des psychiatres non acquis « au tout TCC »! Il suffit dorénavant d’avoir un diplôme de psychosociologue ou de mathématiques ou de professeur d’histoire-géo, -cas de J-L. Racca et Yann Kindo, autres pourfendeurs des « psyK », lesquels roulent comme leur consoeur zététique pour les associations pro ABA et le film « le mur »-,  pour avoir un avis averti concernant le syndrome autistique.
Rappelons que contrairement à ce que dit le collectif de « soutenons le mur » dans une stratégie de désinformation bien huilée la plupart des pédopsychiatres et des psychanalystes souscrivent aujourd’hui à une approche complémentaire de l’autisme et à l’étiologie neuro-génétique, voire neuro-toxique. Les spécialistes de l’autisme reconnaissent en outre les méthodes d’apprentissages et éducatives  issues du cognitivisme (TEACH) ou du comportementalisme (ABA). Reste que comme le dit Pierre Delion (professeur de pédopsychiatrie), la souffrance spécifique des enfants autistes  nécessite un accompagnement psychothérapeutique, voire le packingdans les cas les plus graves.
La manœuvre visant à confondre psychanalystes/psychiatres sur la base de leur incompétence et manque de résultats est grossière. Elle vise dans le contexte de la réforme de la santé mentale à favoriser les neurosciences (la médicalisation de l’esprit), l’apprentissage et la socialisation ( nécessaires, répétons-le ! mais pas suffisantes), au détriment de la psychiatrie et de l’enseignement de la psychopathologie. Tant qu’à faire, pourquoi ne pas remplacer les pédopsychiatres et psychanalystes par des neuro-psychiatres et des psychologues TCC ! Le problème sera enfin réglé…Les parents seront contents. Ils cesseront enfin de souffrir, et leurs enfants aussi. Puisque s’ils souffrent, c’est « la faute aux psyK». La psychanalyse sert d’exutoire à la douleur. On peut au moins lui reconnaître ce mérite…
L’avis du collectif « soutenons le mur » et consorts a plus d’écho dans les médias et auprès des lecteurs de journaux en lignes que les explications basées sur les recherches faites par les grands spécialistes de l’autisme que sont les professeurs Pierre Delion et Bernard Golse.
Par consorts, on entend Sophie Robert, productrice du film « le mur », autoproclamée « anthropologue de la psychanalyse », Magali Pignard mère d’enfant autiste et praticienne ABA, Jean-Louis Racca, Mme Resplendino/consultante, Yann Kindo, blogeurs sur MdP, et tant d’autres encore.  J.-L. Racca (mathématicien ?) fustige Elisabeth Roudinesco dans un billet sur MdP, au motif que n’étant ni historienne, ni psychiatre, elle ne devrait pas s’autoriser un avis sur la question de l’autisme. Dans ce cas, on peut lui faire le même reproche. Sauf que dans le cas d’Elisabeth Roudinesco, ses ouvrages historiques sur la psychanalyse plaident pour elles, ce qui n’est pas le cas de son contradicteur, lequel que je sache, n’a pas produit à ce jour d’ouvrages de références dans ce domaine.
Quant aux  journalistes qui se sont intéressés à l’affaire, ils se sont contentés de relayer le point de vue des non-spécialistes, auto-proclamés experts en la matière, sympathisants ou partisans de l’association qui a commandité le film « le mur », plutôt que d’enquêter dans les services incriminés, accueillant les enfants autistes. Ou se contentent de renvoyer dos-à-dos le clan des psys et celui des pro ABA. Le problème, contrairement à ce que l’opinion croit, est infiniment plus complexe qu’une guerre de chapelles. Ce n’est pas seulement un problème de santé mentale ou de handicap mais aussi un problème politique et éthique. Ces associations par leur intolérance à toutes formes d’altérité (voire leur fanatisme) et leurs méthodes ne sont pas sans rappeler les associations contre l’avortement.
La campagne de dénigrement de la psychanalyse orchestrée actuellement par la nébuleuse scientiste  vise à influencer l’opinion publique, moins sur l’autisme en réalité, que sur les approches issues de la psychanalyse, ou affines. Ainsi, la pratique du packing se trouve à l’heure actuelle au centre d’une seconde polémique directement liée à la première,  -affaire Pierre Delion. Cette dernière polémique solidaire de la première donne lieu à des commentaires  fondés sur des approximations et amalgames, du genre : packing = psychanalyse ( ce qui est faux) ; psychanalystes = tortionnaires. Et d’amalgames en glissements nauséabonds, on en arrive à diffamer des psychiatres dévoués à la cause des enfants malades
Un communiqué du Collectif des 39 nous avertit  sur MdP que le «  Pr Pierre Delion, membre de notre mouvement, affronte en ce moment une campagne de diffamation de la part d’une association de parents d’enfants autistes. Cette association entend dicter sa loi aux professionnels, mais également aux autres parents qui pourraient être tentés par une approche relationnelle prenant appui sur la psychanalyse sans pour autant récuser la nécessité d’une ouverture à toutes les autres possibilités de prise en charge. »
blogs.mediapart.fr/edition/contes.../defendre-le-travail-du-pr-pierre-delion -
L’enjeu dans ce contexte « propagandiste » est double, d’une part relayer le point de vue des associations  de parents d’autistes exclusivement pro TCC (thérapies cognitivo-comportementalistes), de l’autre discréditer les approches héritées de la psychopathologie et de la psychodynamique freudiennes, affines, ou complémentaires. L’enjeu, au-delà des doléances des parents d’enfants autistes, serait-il la conquête du marché de la santé mentale en France, mondialement acquise aux TCC ? Dans ce contexte, les partisans de la méthode ABA se livrent à un intense lobbying.Deux élus UMP , Nadine Moreno et Daniel Fasquelle se sont engagés dans leur combat.
« La secrétaire d'Etat à la famille, Nadine Morano, a souligné jeudi sa volonté d'encourager les "méthodes comportementalistes" dans le traitement de l'autisme, à la veille d'une journée mondiale de sensibilisation à cette maladie. "La France était en retard sur les méthodes comportementalistes", a affirmé Mme Morano, lors de la visite à Paris d'une école expérimentale recourant à une méthode éducative, fondée sur l'analyse du comportement appliqué, dite ABA (Applied Behavior Analysis). »
www.lemonde.fr/.../journee-mondiale-de-l-autisme-morano-veut-encourager- les-methodes-comportementalistes_1327718_3224.html 
Quant  à D. Fasquelle, il envisage  ni plus, ni moins, une
« Proposition de loi visant l’arrêt des pratiques psychanalytiques
dans l’accompagnement des personnes autistes,
la généralisation des méthodes éducatives et comportementales,
et la réaffectation des financements existants à ces méthodes

Présentée par Daniel FASQUELLE,
Député du Pas-de-Calais  
www.danielfasquelle.blogspot.com/ -
Les sympathisants du collectif « soutenons le mur » moquent ceux qui osent s’interroger sur leur combat et leurs méthodes, allant jusqu’à dire qu’ils sont des adeptes de la « théorie du complot ». Ce n’est peut-être pas un complot, mais cela ressemble fort à un plan concerté entre les associations de parents pro ABA, des officines neuroscientistes et certains représentants de l’UMP. A ceux-là s’ajoutent quelques scientistes égarés par leur idéal de scientificité, près à en découdre avec tout ce qui s’apparente selon eux à une pseudo-science. Aveuglés par leur croisade, ils ne voient pas que cette affaire du film « le mur », est un événement interdépendant de la nouvelle politique de santé mentale en France. Le combat du collectif « soutenons le mur » est exemplaire de l’alliance entre ultralibéralisme (privatisation des services et contrôle social des populations via la gestion sécuritaire et économique des risques), scientisme (idéal du progrès d’essence néolibérale imposé à tous, via les directives de l’OMS et le modèle hégémonique du DSM) et populisme (dérive sécuritaire impulsée par Nicolas Sarkozy) qui ne laisse pas d’inquiéter. Que les usagers reprennent la main, quoi de plus normal ! Mais si c’est pour se faire instrumenter, et participer du démantèlement des services publics au profit de structures privées supposées mettre en œuvre des approches scientifiques, non merci !
La rhétorique du collectif « Soutenons le mur » et consorts 
La rhétorique du collectif « Soutenons le mur » se distingue par sa trivialité et son agressivité. Un exemple : les psychistes (3), quelle que soit leur orientation, -certains en effet ne sont pas freudiens-, et leurs sympathisants se voient systématiquement affublés du sobriquet psyK. C’est un des signifiants du dialecte geek, issu de la novlangue scientiste. Le K final est parfois redoublé, façon, psyK Klan, marque infâmante, implicitement rapprochée de l’acronyme KK pour Klux Klan. C’est un détail certes, mais révélateur de la haine quasi célinienne (du point de vue du style) des militants de « Soutenons le mur ». Derrière « le style », chercher les relents fanatiques…
A lire la littérature des militants pro TCC, intéressés à la polémique « Le mur », on constate qu’on est en présence, non pas d’une argumentation raisonnée mais face à une rhétorique amputée de la partie « raisonnement », aussi bien purement « publicitaire ».
Dans la rhétorique, il y a une part de discours rationnel (logos), une part de discours émotionnel (pathos), une part enfin de discours référentiel et moral (èthos). Selon Barthes, le logos renvoie au message que l’émetteur (personne ou entité) veut faire passer, le pathos vise à émouvoir l’auditoire et à s’attirer sa sympathie, sinon son accord épidermique, l’èthos renvoie à l’émetteur et à son point de vue moral.
Dans les interventions des défenseurs du film « le mur », la part du « logos » est réduite au minimumau profit de l’èthoset du pathos. L’éthos confond dans le discours des partisans du film « Le mur »  le point de vue moral et le point de vue idéologique et met en avant, moins le raisonnement de l’auteur que sa personnalité. L’auteur(e) libellé TCC agit le plus souvent en qualité estampillée de mère d’enfant autiste. Dès lors sa parole au titre de son vécu douloureux, -et de ses griefs acrimonieux-, atteste par son authenticité sentimentale de la véracité scientifique des arguments avancés, posés comme éminemment scientifique à l’aune des stigmates exhibés. La souffrance pour être légitime, valide des jugements péremptoires tels que « Les approches psychanalytiques  comme le packing sont cliniquement et thérapeutiquement indéfendables, leurs conséquences désastreuses ».
Nulle étude sérieuse et neutre sur le sujet n’est citée, références comprises. Faute d’études, on renvoie à d’autres articles ou billets du même acabit : vécu parental  = preuve scientifique = démonstration. Que des journalistes se soient prêté à cette stratégie mêlant victimologie parentale et cris d’orfraie scientistes, stratégie bénéficiant en outre à des labos privés d’obédience neuroscientiste, voire, on l’a dit, à la politique actuelle de la santé mentale, sans plus s’interroger sur les tenants et les aboutissants de cette affaire, ne laissent pas d’inquiéter sur la qualité de l’information délivrée.
Les zététiques montent au créneau, ravis d’avoir à se mettre sous la dent, une science plus consistante que l’ufologie ou l’astrologie. Outre qu’une telle affaire constitue une sacrée pub ! Enfin, on n’entend jamais les premiers intéressés dans l’affaire, à savoir les autistes (adultes) eux-mêmes. Dommage, ils auraient sûrement des choses intéressantes à nous dire sur la méthode ABA, par exemple.
Mais de quels intérêts réels, les enfants « autistes » sont-ils devenus les otages ? 
Et maintenant, voyons de près les réponses apportées aux contradicteurs de Sophie Robert ou à ceux qui « doutent » par rapport à la cause du « mur », comme Nathalie Roussy victime, (comme moi-même), d’attaques verbales sur la toile pour avoir osé s’interroger sur le film et ses partisans, puis avoir appelé au dialogue. Dialoguer plutôt que s’invectiver, quelle idée !
Lien
La partie supposée rationnelle de la rhétorique des  militants du film « le Mur » se caractérise par l’indigence des argumentaires, la mauvaise foi, les anathèmes, les amalgames et approximations, l’absence de dialectisation, laquelle pourtant enrichirait la démonstration.
La plupart des réponses, on l’a vu, se focalisent sur lepathos, et visent comme les messages publicitaires « à plaire sans forcément démontrer le bien-fondé de leur produit », ici sans démontrer solidement le bien-fondé de leur cause commune : faire front contre l’approche psychanalytique et affine (packing). Dans une époque où la victimologie (directement importée des Etats-Unis) triomphe, les réponses des parents pro TCC consistent essentiellement à émouvoir par le témoignage des souffrances endurées, mises sur le compte des abus des psychanalystes.
On ne présente que ce qui paraît probable ou vraisemblable. Effet d’annonce garanti ! « La psychanalyse a des conséquences désastreuses », martelé au fil des commentaires, d’une réponse à l’autre, la répétition  valant ici comme critère de vérité. C’est l’exemple même de l’argumentation fallacieuse.
Les arguments
Ils se fondent :
-sur la confrontation de deux modèles opposés,  présentés comme irréconciliables, sur la base exclusive, on l’a vu, de témoignages des parcours douloureux des parents dénonçant les pratiques psyk comme le packing vs les bonnes pratiques TCC, à la fois bienveillantes et efficaces. Ces témoignages sont présentés comme des « faits  incontestables», et qu’importe s’ils sont déformés par la subjectivité à la fois  doloriste et agressive des témoins ;
- sur la disqualification (de l’adversaire) par l’ironie (le ridicule est censé tuer. C’est la méthode Sokal/Bricmont lesquels ont érigé le canular comme principe de dénonciation scientifique. La fiction venant ici au secours de la science) ou sur l’argument d’autorité (l’expert TCC internationalement reconnu cité à la rescousse d’une argumentation « langue de bois » dont le but est de convertir à peu de frais les indécis ou néophytes.
Parmi ces arguments, on rencontre diversement mêlés au reste, des arguments manipulateurs, tronquant ou décontextualisant les citations de psychanalystes connus, pour mieux révolter l’auditoire.
Tout cela sans apporter aucune preuve : ni judiciaire (si mauvais traitements il y a, la justice devrait avoir son mot à dire) ni réellement scientifique puisqu’on est essentiellement dans le registre du pathique, voire de l’empathique. But : provoquer l’identification du public aux malheureux parents traumatisés par les psyK.
Autres procédés à l’œuvre dans les interventions des défenseurs du film « le mur » : l’intimidation et  la culpabilisation des contradicteurs. Etonnant pour des gens qui ne cessent de dénoncer celle faite à l’encontre des mères d’autistes ! Si vous n’êtes pas avec les parents, c’est donc que vous êtes contre eux (les mères en particulier), par suite contre les enfants. Je ne vois pas bien le rapport. Le fait d’être parent d’autistes ne délivre pas automatiquement un brevet de bonne conduite. On ne voit pas pourquoi les parents d’autistes échapperaient aux difficultés inhérentes à la fonction de parents. Toute défaillance parentale étant par ailleurs bien compréhensible et humaine. Ce n’est pas facile d’être parent, a fortiori dans le cas où les enfants sont  porteurs d’une maladie grave ou d’un handicap. Si le handicap transforme en effet l’existence des parents comme des enfants en parcours du combattant, doit-on pour autant instrumenter cette situation, à des fins publicitaires, ciblées sur un seul et unique produit thérapeutique  (la méthode ABA) ?
Dans cette affaire, on n’impute jamais la cause des dysfonctionnements de prise en charge à la politique de santé mentale, laquelle soumet à des restrictions budgétaires drastiques les services pédo-psychiatriques et les IME, avec des conséquences, réellement désastreuses pour l’accueil et l’accompagnement des enfants autistes. On préfère l’imputer uniquement à la fantasmatique hégémonie de la psychanalyse dans le domaine de la santé mentale. Idée fausse démentie par l’ouvrage de Robert Castel, La gestion des risques. Robert Castel analyse comment et pour quelles raisons les psychotechnologies ont remplacé la psychanalyse depuis les années 80, dans une conjoncture post-disciplinaire s’appuyant « moins sur les contraintes » que sur « la programmation de l’efficience ».
Toutes ces manœuvres manipulatoires visent à modifier l’opinion publique, plutôt qu’à répondre à l’adversaire PsyK (désavoué dès lors qu’il répond et quoi qu’il dise) alors même que les interventions des partisans du « Mur » se présentent comme réponses. Elles sont des pseudo-réponses puisqu’elles n’envisagent aucun questionnement différent ou aucun doute, de sorte qu’on peut les classer dans le genre des « annonces », voire des « slogans ». Elles tournent en boucle d’un site à l’autre. But : enfoncer dans le crâne toujours les mêmes messages, par suite emporter la conviction, voire l’adhésion inconditionnelle du public. De là, le silence de la plupart des psychanalystes qui ne veulent pas participer à cette polémique, d’emblée faussée.
L’argumentation est ravalée au rang de l’opinion, et ne fait pas démonstration, à tout le moins scientifique. Faute de raisonnement analytique ou de progression dialectique, on a la recension d’exemples tirés de la littérature (psychologie scientifique) dans le meilleur des cas, de témoignages de parents ou de professionnels ex-psychanalystes, -des repentis donc !-, lesquels expriment à longueurs de phrases des griefs amers lesquels valent pour arguments. Pire, ces exemples sont repris légèrement remaniés d’un texte à l’autre. Saturation garantie ! Quant aux citations et références à la littérature (scientifique), elles semblent avoir pour seule fonction de dispenser l’auteur du billet ou commentaire d’une réflexion véritablement personnelle.
On nous nous assène des signifiants récurrents tels qu’ « incontestable ». Dans une des réponses, ils forment même l’ossature du plan : thèse :incontestable, antithèse : incontestable, synthèse : incontestable.
Lien
article intitulé reponse à Taky Varsö. Lisez cet article dans son intégralité ici.
fr-fr.facebook.com/note.php?note_id=311876415509683 -
Autre méthode, envahir l’écran du Net et noyer toute contradiction sous l’avalanche des messages revendicateurs. Stratégie : prendre en tenaille l’ennemi, et l’étouffer sous les logos, les images attendrissantes (version icônes de la mère à l’enfant) vs les caricatures des psyks (version staliniens avec moustache et casquette qui vont bien). Impossible de dialoguer avec un énonciateur collectif qui  base son argumentaire sur ses propres certitudes et les impose sans nuances. Le raisonnement patine forcément.
On accumule des informations sans les analyser, les contextualiser et les périodiser. Et même quand on nous assure du contexte (en titre de partie), on se rend compte qu’il n’en est rien. Outre qu’on aura beau enfiler les informations  comme les perles d’un collier, cela ne fera pas une démonstration.
Une lecture comparée des argumentaires de la CIPPA (Coordination Internationale entre Psychothérapeutes psychanalystes, s'occupant de Personnes avec autisme :
old.psynem.org/Cippa/ - )  et des partisans du film « le mur » montre dans quel camp se situent le dialogue et le raisonnement scientifique…
La référence à l’unanimité internationale (anglo-saxonne) sur les TCC et le DSM, liée à l’OMS, constitue un argumentprinceps dans l’argumentaire des partisans du film « le mur » . C’est, nous dit-on, le gage de leur scientificité« incontestable ».
On considère les exemples comme des preuves scientifiques, et non plus comme l’illustration d’arguments ou visant à étayer une démonstration. Ces messages à destination d’un public de sympathisants ou passif (reconnu comme pouvant être convaincu facilement) qui s’étaient multipliés à quelques jours du procès du film « le mur », n’impliquaient en réalité aucun débat ni dialogue.
On considère le public, soit acquis à la cause commune, soit ennemi, y compris quand les contradicteurs ne sont pas pro Psyk, plutôt à chercher la vérité, sur la base de critères fiables de jugement, donc privilégiant une position neutre (la seule véritablement scientifique). Dès lors, reste à dialoguer pour faire semblant comme disent les enfants (pour faire démocratique et jouer en apparence le jeu du débat) mais en bidonnant les coordonnées du dialogue dès le départ. Les réponses proposés n’invitent en réalité à aucune discussion. On cherche l’affrontement à tout prix. La relation au contradicteur est considérée comme inenvisageable. 
On pose la thèse psyK négative, puis l’antithèse TCC positive.  Au fond, on ne cherche pas à emporter la conviction rationnelle, mais la conviction compassionnelle ou réactionnelle agressive.  Le discours est manichéen. Y a les méchants d’un côté (les Psyk sadiques), de l’autre les gentils professionnels TCC ; les pseudoscientifiques psyK d’un côté, les vrais scientifiques TCC de l’autre, le tout à l’avenant. Doit-on considérer le conditionnement de la méthode ABA comme un progrès scientifique indéniable ?
La seule preuve scientifique qui émerge dans ces réponses en forme de fourre-tout est celle de l’imagerie cérébrale combinée à la causalité génétique laquelle n’est pourtant qu’une théorie parmi d’autres concernant l’étiologie du spectre autistique. Les thèses en présence ne sont pas articulées avec l’autisme et ses divers modes de prise en charge, contrairement aux réponses de la CIPPA et de Geneviève Haag. L’argumentation des partisans du film « Le mur » est truffée d’éléments insérés à valeur supposée de preuves. Les arguments doivent paraître vraisemblables plutôt qu’être vrais.
On est avec le discours de « soutenons le mur » dans le registre de la polémique, et non dans celle du débat scientifique ou du dialogue réfléchi. Sa médiatisation via le Net a amplifié le phénomène. .
Camus définissait ainsi la polémique/
 «  Elle consiste à considérer l’adversaire comme un ennemi, à le simplifier, par conséquent à refuser  à le voir. Celui que j’insulte, je ne connais plus la couleur de son regard, ni s’il lui arrive de sourire et de quelle manière. (…) Il n’y a pas de vie sans persuasion. Et l’homme aujourd’hui ne connaît que l’intimidation. » Ajoutons, « et l’homme aujourd’hui ne connaît »  que la mauvaise foi » et la manipulation.
Persuader, en effet, c’est instruire. Le film « Le mur » s’il avait été neutre comme l’y engageait son genre, précisément documentaire, aurait pu être le lieu d’une vision contradictoire, réellement critique. Hélas ! comme ridiculisation des uns (psychanalystes) par les autres (TCC), il a mis le feu aux poudres sans enseigner plus avant  sur l’autisme et ses diverses approches.
On a une curieuse impression à la lecture des billets et commentaires des parents pro TCC et de leurs sympathisants scientistes, celle de lire la même prose. Comme s’ils avaient été écrits par la même personne, laquelle en outre n’en serait pas vraiment une, mais plutôt le reflet d’un discours émanant d’officines (pour certaines d’entre elles dotées de moyens financiers conséquents et soutenues par le pouvoir actuel), planquées derrière les associations de parents et tirant les ficelles.
Le vocabulaire du dialecte scientiste est celui du résultat (compter, mesurer, évaluer). Dans cette logique, la rationalité est alignée sur le chiffrage. La raison a peu à voir avec la rationalisation de type quantification/évaluation, principe de la marchandisation des corps et des âmes, argument princepsdu Marché.
Le discours pro TCC ne rechigne ni à la publicité, ni à la propagande. Ce qui compte, c’est l’action exercée sur l’auditoire (le public) plus que la vérité (la justesse ou l’intelligence des postulats). On cherche à façonner (dresser/redresser) l’opinion comme on cherche à formater les esprits. Mais la rationalité invoquée si souvent, (univoque), en restreignant les possibilités interprétatives, constitue un frein à l’analyse précisément rationnelle. L’art du bien dire (critiqué comme « littérarisme » par les néo-positivistes) auquel sont attachés les vrais scientifiques, ouverts, créatifs, audacieux, est en voie de disparition. La faute sans doute à la formation actuelle (toujours plus « cognitive » et moins littéraire) des jeunes étudiants-chercheurs. La victoire des experts de tous bords, dépourvus de culture et inaptes à la réflexion, ces nouveaux Homais, ne présage décidément rien de bon, mais cela est une autre histoire…
Note:
La gestion des risques, Robert Castel, 1981/2011, Les Editions de Minuit.